La Gnose contre la Foi

La gnose contre la Foi Histoire d'une tumeur au sein de l'Église

La gnose est une végétation parasite du christianisme qui prétend donner l’accès à une connaissance ésotérique cachée dans le message du Christ ainsi que dans le rituel traditionnel de l’Église catholique. Dans son Adversus hæreses, saint Irénée (IIe siècle ap. J.-C.) explique la méthode de recrutement des initiés gnostiques — elle n’a pas changé depuis le Ier siècle : « ils attirent les gens en leur parlant comme nous parlons nous-mêmes. Ils se plaignent de ce que nous les traitons comme des excommuniés alors que, de part et d’autre, les doctrines sont les mêmes. Et puis ils ébranlent peu à peu la foi par leurs questions. De ceux qui ne résistent pas, ils font leurs disciples. Ils les prennent à part pour leur dévoiler le mystère inénarrable de leur Plérôme. » Nous remercions Étienne Couvert de nous permettre la mise en ligne de sa remarquable synthèse sur la Gnose contre la Foi. [La Rédaction]

Introduction de Vive le Roy

Le texte qui suit est un extrait du livre d’Étienne Couvert, De la gnose à l’œcuménisme, « La Gnose, tumeur au sein de l’Église », Éditions de Chiré, Poitiers, 1983, p. 9-36.


Données historiques

Introduction

La découverte en Égypte, près de Nag Hammadi, en 1946, d’une bibliothèque gnostique en langue copte a renouvelé nos connaissances sur la Gnose. Auparavant, il était courant de définir la Gnose comme une pénétration de la pensée grecque dans le Christianisme primitif ou comme le résultat d’un syncrétisme oriental, les religions de l’Inde, de la Perse, de l’Égypte, s’efforçant de pénétrer la jeune Église et d’y faire germer leurs propres croyances.

Depuis la découverte de ces manuscrits, il nous faut bien réviser ces thèmes et ramener la gnose à une origine plus proche du Christianisme ; elle est née en milieu judéo-chrétien, elle s’est nourrie d’une pensée spécifiquement juive, empruntée à tout un bagage littéraire tiré de l’Ancien Testament, même si elle a pris son vocabulaire au grec et des formules d’apparence philosophique à l’Égypte et à l’Iran. Il faut, en effet, distinguer soigneusement un fond culturel ou religieux sur lequel va se développer un enseignement nouveau et ce qui constitue le caractère spécifique de ce dernier : ce ne sont pas des similitudes de vocabulaire, des formules reprises ici ou là qui le constituent, mais c’est la nouvelle ordonnance de l’ensemble.

Or, l’enseignement gnostique est original.
– On ne le retrouve nulle part ailleurs, ni dans les religions païennes connues à cette époque, ni dans la philosophie grecque, ni dans l’astrologie.
– La Gnose n’est pas une Église : elle n’a pas provoqué l’apparition d’un clergé avec une hiérarchie, ni de rituels liturgiques
– La Gnose n’est pas une philosophie : elle ne prétend pas démontrer à l’aide de la raison des vérités universelles, accessibles à tous les hommes de réflexion. Elle ne donne pas de l’Univers une vision rationnelle. Elle refuse un enseignement commun diffusé par une école.

La Gnose est essentiellement une végétation religieuse parasitaire, se nourrissant du Christianisme pour en tirer un certain nombre d’éléments qu’elle va détourner de leur sens naturel pour leur donner une signification nouvelle totalement opposée à l’enseignement de l’Église.
La Gnose est une secte d’initiés, prétendant avoir reçu une révélation plus parfaite que celle de Jésus, réservée à des esprits d’élite qui vont être détournés de l’enseignement ordinaire de l’Église et constituer comme un chancre rongeur à l’intérieur de la communauté chrétienne.

La révélation de Jésus-Christ

Les miracles de Jésus en Palestine furent le point de départ d’un immense étonnement : on ne pouvait les nier ; même les Pharisiens et les Sadducéens y assistaient comme frappés de stupeur ; on disait :

d’où lui vient donc son pouvoir ? Qui est-il donc que les flots et les vents lui obéissent ? Jamais nous n’avons vu tel prodige !

Le premier gnostique, leur maître à tous, Simon le Magicien, se prétendait capable de provoquer des miracles par une savante mise en scène ; mais devant les vrais miracles de saint Pierre en Samarie, il fut proprement suffoqué. Aussi demanda-t-il à saint Pierre de lui vendre son pouvoir, de lui révéler ses « trucs » de magicien. Après l’étonnement, est venue l’indignation, on disait :

C’est par Béelzébud qu’il chasse les démons !

Son enseignement également provoquait une stupeur bien justifiée :

D’où lui vient donc sa science et sa sagesse ? N’était-il pas le fils d’un charpentier ?

On peut faire une distinction dans cet enseignement :
– d’une part, les paraboles, vérités morales simples, accessibles aux esprits les plus frustes, mais aussi vérités profondes accessibles aux plus hautes intelligences ; et,
– d’autre part, son enseignement proprement divin : les grands mystères sur Dieu, dépassant infiniment les capacités de toute intelligence.

Lorsque les Apôtres vont répandre cet enseignement à travers le monde, il va prendre un essor extraordinaire. Il va atteindre en un siècle tout l’empire romain et toutes les classes de la société. Voilà encore la source d’un profond étonnement :

Comment de simples pêcheurs galiléens ont-ils pu ainsi être écoutés et suivis par des communautés nombreuses et des esprits de tous les niveaux ? Là aussi, il doit y avoir une cause secrète, cachée, qu’il faut découvrir !

Les Gnostiques n’ont pas compris ceci : les vérités les plus simples, saisies par les esprits les plus pauvres au niveau du sens commun, sont aussi les vérités les plus profondes qui ne peuvent être saisies au niveau le plus élevé que par une élaboration intellectuelle difficile, une réflexion soutenue, une sagesse acquise par une longue expérience.
Ils vont donc chercher la cause de cette expansion dans un enseignement secret, réservé par Jésus à quelques disciples privilégiés : Jacques, Jean, Matthias ou Thomas.
Ils vont distinguer l’enseignement exotérique, diffusé par les Apôtres aux gens du commun et un enseignement ésotérique, réservé par Jésus et quelques Apôtres à des initiés supérieurs.
Voilà l’origine de la Gnose.

Précisons encore ceci : l’enseignement de Jésus et des Apôtres fut aussi à l’origine d’une grande déception : le Christianisme ne prétend pas donner d’emblée, par une simple affirmation gratuite, la certitude immédiate et définitive du salut éternel : il faut pour l’atteindre une vie de vertu, de renoncement, d’ascèse : il peut toujours être remis en cause par le péché. Ce salut final est gagné par l’effort constant de tout l’être vers la perfection. Voilà qui est singulièrement exigeant, difficile, ardu, mais rendu possible par l’action de la grâce.

Les Gnostiques vont donc chercher un moyen de salut immédiat, définitif, évitant cette obligation d’un effort constant sur soi. Ils vont le présenter comme un secret dont la possession doit vous délivrer de toute inquiétude et vous assurer un repos dans la certitude.

Enfin, pour les Gnostiques, le Christ n’a pas donné une réponse pleinement satisfaisante sur l’existence du mal dans le monde. Ils vont donc chercher l’origine du mal non point dans l’homme, mais dans le monde divin, l’homme n’étant point pécheur et donc coupable, mais victime d’un mal qui lui a été imposé d’en-haut. Il faudra attendre les grands docteurs chrétiens et précisément saint Thomas d’Aquin pour trouver cette réponse adéquate à la difficulté soulevée.

À partir de ces considérations sur l’enseignement de Jésus vont se déduire toutes les affirmations des Gnostiques. Mais avant de les développer, il faut examiner leurs procédés :

Les procédés gnostiques

L’examen des faits montre que les Gnostiques ont suivi dans son développement l’expansion du Christianisme, s’attachant aux pas des disciples et soulevant les objections dont nous avons parlé soit directement en face, soit indirectement en les chuchotant aux premiers convertis enthousiasmés.
– Après le meurtre de saint Étienne, saint Pierre se réfugie en Samarie et se trouve aussitôt en face de Simon le Magicien, père de la Gnose.
– L’Église se développe à Antioche, en Syrie ; aussitôt, on voit apparaître Nicolas, un des diacres, qui donna son nom aux Gnostiques Nicolaïtes, puis Ménandre, Satornil.
– L’Évangile est prêché en Égypte, à Alexandrie. On y entend alors l’enseignement de Basilide, dont les formules sont si proches du Bouddhisme, puis Valentin, le plus grand des Gnostiques.
– À Rome, on entend celui de Marcion ;
– à Lyon, celui de Marcos, etc.

Les Gnostiques se fondent au milieu des communautés chrétiennes. Ils donnent un enseignement individuel, discrètement. Tertullien nous dit qu’ils commençaient …

… par énoncer la foi commune en des formules équivoques ! … pour induire les fidèles en erreur.

Saint Irénée nous raconte…

… qu’ils attirent les gens en leur parlant comme nous parlons nous-mêmes. Ils se plaignent de ce que nous les traitons comme des excommuniés alors que, de part et d’autre, les doctrines sont les mêmes. Et puis ils ébranlent peu à peu la foi par leurs questions. De ceux qui ne résistent pas, ils font leurs disciples. Ils les prennent à part pour leur dévoiler le mystère inénarrable de leur Plérôme.

Voici un joli texte tiré du Contra Hæreses de saint Irénée. On le dirait écrit d’aujourd’hui. Nous assistons encore maintenant à de telles manœuvres !

Les Gnostiques pratiquent « l’anonymat » comme un système d’enseignement. Ils ne signent pas leurs écrits. Nous ne connaissons leurs noms que par les hérésiologues et ceux-ci eurent beaucoup de mal à les découvrir. Ils eurent autant de mal à se procurer leurs manuscrits secrets. Saint Épiphane nous raconte comment lui-même a fréquenté un temps les Gnostiques d’Égypte, attiré dans leur antre par quelque femme :

Si j’ai échappé à leurs griffes, dit-il, cela n’a pas été dû à ma seule vertu personnelle, mais à l’aide divine qui répondit alors à mes prières.

Grâce à son passage parmi eux, nous avons beaucoup de renseignements sur les différentes sectes et les manuels utilisés. Saint Épiphane catalogue avec une précision remarquable les maîtres, leurs écoles, leurs manuscrits.

Les Gnostiques ne signent pas leurs écrits, mais ils fabriquent des écrits…

… auxquels, dit saint Athanase, ils attribuent de l’antiquité et donnent les noms des saints. (c’est-à-dire des Apôtres [Note de l’auteur])

Ce sont des « pseudépigraphes » et non des « apocryphes ». Nous connaissons les véritables auteurs de ces livres, mais les auteurs désignés dans le texte sont mensongers : ce sont Le Livre secret de JeanLa Sophia de JésusL’Apocalypse de JacquesLe Discours de ZoroastreL’Apocalypse d’AdamLe Discours d’HermèsL’Évangile de ThomasLes paroles secrètes de Jésus, etc.

En général, Jésus, après la résurrection, a pris à part quelques disciples, Jacques, Jean, Thomas, et assis sous un arbre, il leur révèle un enseignement qu’ils devront garder pour eux-mêmes et ceux qu’ils jugeront dignes de le comprendre.

La lecture de l’Évangile de Thomas est en particulier très suggestive. Cet Évangile était un ouvrage de base des Gnostiques et particulièrement des Manichéens.
Une première lecture superficielle du texte laisse dans l’esprit l’impression d’ensemble qu’il s’agit d’un ouvrage parfaitement orthodoxe, les trois quarts des paroles de Jésus étant substantiellement identiques à celles des Évangiles canoniques ; mais une relecture plus attentive fait apparaître certaines insistances qui dénotent une intention sous-jacente : ce sont, par exemple,
— des répétitions fréquentes :
« Que celui qui a des oreilles pour entendre entende »
« Ainsi, vous accéderez à la contemplation de ce que nul œil n’a vu »
« Connaissez-vous vous-même et ce qui est caché vous sera révélé » (sous-entendu : connaissez que vous avez en vous-même la divinité)

— des formules panthéistes :
« Lorsque vous ferez que les deux soient un, vous deviendrez fils de l’Homme » (c’est-à-dire votre retour à l’unité primordiale fera apparaître votre essence divine)
« Fends le bois, je suis là, soulève la pierre et tu m’y trouveras ! »
« Le royaume est en-dedans de vous »
« Toute femme qui sera faite mâle entrera dans le royaume des cieux ! »…

Ainsi, à partir de formules orthodoxes, par insistances sélectives, par adjonctions de formules en apparence obscures ou mystérieuses, on voit se dessiner déjà les principales thèses gnostiques qui semblent alors être issues de la bouche même du Christ. Il n’y aura plus qu’à développer ces formules, tout en s’affirmant fidèles disciples de Jésus.
Enfin, un procédé remarquable, utilisé avec grand succès par les Gnostiques, fut de « récupérer » pour renforcer leur prestige les Grands Initiés du paganisme : Orphée, Pythagore, Hermès, Zoroastre, Homère même.

Il ne s’agit pas d’un syncrétisme religieux, c’est-à-dire que les Gnostiques ne cherchent pas à amalgamer les doctrines religieuses variées ou contradictoires pour en tirer une doctrine « dénominateur commun ». Il ne s’agit pas d’une super-Église fourre-tout.
Bien au contraire, il s’agit très exactement de faire tenir à ces personnages célèbres de l’antiquité, dont l’enseignement avait été oral, le langage même de la doctrine gnostique. C’est le recours à une autorité incontestée dans le passé et la rédaction de textes factices, attribués après coup à ces lointains ancêtres.

Ainsi, on voit Orphée représentant le Christ dans les anciennes catacombes romaines, à une époque où il avait été difficile de séparer les vrais Chrétiens des Gnostiques. Les hérésiologues leur reprochaient de représenter le Christ sous des visages païens : Hermès, Orphée, Homère, Pythagore. Saint Irénée raconte qu’une femme, Marcellina, avait rapporté à Rome un oratoire avec les figures de Jésus, Homère et Pythagore. Les sectaires avaient des médailles ou des statuettes représentant Platon, Pythagore. L’empereur Alexandre Sévère était également gnostique. Il vénérait dans son laraire Jésus-Christ, Abraham, Orphée et Apollonios de Tyane.

Dans la première catacombe, celle de saint Sébastien, on trouve dans une hypogée des Innocentii des inscriptions chrétiennes où se retrouvent les surnoms d’Hermès, Hermesius, Hermesianus. Carcopino décrit une tombe de Ravenne du 3e siècle : la petite défunte, Juliana, est interpellée au masculin : « Salut, Eugamius » ; elle est représentée assise et Hermès lui touche les yeux, pour l’éveiller, avec une baguette de magicien. Il s’agit très certainement d’une tombe chrétienne gnostique. Le Christ est parfois représenté sous forme d’un dieu païen, armé d’une baguette avec laquelle il ne ressuscite pas le mort, mais l’appelle au « réveil » :

Ouvre les yeux ! Vois ! Tu es divin !

Carcopino décrit une basilique pythagoricienne de Rome, assez semblable à une hypogée d’un cimetière chrétien. Il raconte une cérémonie liturgique qui paraît calquée sur la Cène chrétienne.
Homère était interprété par eux ainsi : Ulysse retenu dans l’île de Calypso désignait l’âme, étincelle divine, prisonnière du corps matériel et hésitant encore à se délivrer de son geôlier.
Les textes d’Hermès Trismégiste (= trois fois grand) ont été retrouvés dans la bibliothèque gnostique copte. De même, les « Vers d’Or » attribués à Pythagore, sont bien postérieurs au début du Christianisme ; ils datent au moins de la fin du 1er siècle et contiennent des formules proprement gnostiques :

– Tu sauras que la nature est UNE et semblable en tout (panthéisme)
– Celui qui a transmis à notre âme la TETRAKTYS, source de la nature infinie (le nom divin est la nature de notre âme)
– À ceux qui savent éveiller ce qu’il y a de sacré dans leur âme, la nature montre toute chose
– Lorsque tu abandonneras ton corps, tu seras immortel, un dieu immortel et non plus un mortel… etc.

Ainsi, la Gnose s’est développée comme une secte parasitaire à l’intérieur du Christianisme pour en subvertir tout l’enseignement. On reconnaît déjà les procédés de nos modernistes dans l’art de séduire et de détourner les âmes de la Vérité ; on reconnaît encore la Légende naissante des « Grands Initiés » qui se transmettent de génération en génération une doctrine secrète.

L’enseignement de la gnose

Pour bien comprendre les « Révélations » des Gnostiques, il est nécessaire de les débarrasser de tout le fatras mythologique dont elles sont ornées ou plutôt embrouillées, de les débarrasser également d’un vocabulaire obscur qui avait la prétention de les rendre vénérables. Nous ne parlerons ni d’Éons, ni d’Archontes, ni de Plérôme, etc.

Mgr Lagier, dans son ouvrage sur L’Orient chrétien énumère plusieurs propositions en lesquelles peut se résumer tout l’enseignement de nos hérétiques. Nous verrons qu’à partir de ces affirmations étranges, on peut tirer toutes les grandes erreurs du monde moderne.

Le Dieu dont nous parle l’Ancien Testament est peut-être une divinité inférieure, ce n’est pas le vrai Dieu. Bien au-dessus de Lui se tient l’Être suprême, unique principe de tout ce qui est

Les Gnostiques ont pratiqué un antibiblisme systématique.
– Ils ont retourné à l’envers toutes les affirmations de la Genèse.
– Leur cosmologie est une machine de guerre dressée contre Yahvé, le Dieu créateur.
– Le monde en son essence est divin.
– L’Être suprême est un abîme originel d’où sont sorties toutes les puissances spirituelles. C’est déjà une première forme de panthéisme.
– Yahvé Sabaoth, le Dieu créateur de la Genèse, est une émanation de l’Être suprême ; il s’est révolté contre lui en enfermant dans une matière dégradée et mauvaise les êtres purs, spirituels, émanés du grand abîme. Ce fut un démiurge (= architecte) maladroit. Il est la source de tous les maux.
Voilà une explication de l’origine du mal et la désignation du grand coupable, le Dieu qu’adorent les Chrétiens.

La matière, en soi, s’oppose à Dieu

Comprenons bien que cette matière n’est pas une émanation de l’Être suprême, mais une création du démiurge, œuvre maladroite qui va s’opposer à la perfection de la puissance divine, entraver son expansion. Il y eut donc dans cet acte créateur une erreur, une dégradation des êtres spirituels, une « chute originelle », non point celle du péché d’Adam, mais celle du Péché de Yahvé.

Dieu se déploie et se révèle graduellement par des puissances célestes, par des êtres divins en leur origine

C’est la doctrine de l’émanation (emanare = se répandre hors de soi).
– Le monde est une divinité qui se répand hors d’elle-même, par une extension de son être ;
– le monde est un Dieu-Être suprême en perpétuelle croissance.
– De l’abîme originel, ce Dieu engendre une multitude d’êtres qui ne sont que des parcelles de lui-même.
– Le monde est en perpétuel devenir. Il est divin par nature, puisqu’engendré et non créé. Hélas !
– Yahvé a formé la matière, il a dégradé ce monde, il en a ainsi entravé l’expansion, l’évolution vers cette plénitude divine que les Gnostiques appellent le « Plérôme ».

De plus, Dieu se révèle à l’intérieur du monde par ses envoyés, être divins, engendrés par lui, qui, à intervalles réguliers, vont rappeler aux hommes déchus et prisonniers de la matière qu’ils sont eux aussi divins. Il faut donc une révélation continue : on voit apparaître là les premiers linéaments de la légende des Grands Initiés. La Gnose est bien une « révélation » d’une réalité cachée.

La matière est mêlée d’étincelles divines ; ces étincelles sortent de leur prison matérielle grâce au Christ qui agit dans les rites sacrés de la magie

– L’âme humaine est donc divine (étincelle ou éclat d’un Dieu qui s’étend à tous les êtres).
– Le corps est une gangue terreuse, une prison dont il faut se débarrasser pour faire apparaître cette divinité qui réside en nous.
– Le Christ est le plus grand des Initiés envoyés d’en-haut. Il va apprendre aux hommes qu’ils sont divins. « Regardez à l’intérieur de vous-mêmes et vous y verrez votre propre divinité », telle est la formule répétée dans l’évangile de Thomas.
– Pour cela, il faut vous débarrasser de cette prison matérielle qui vous cache votre vraie nature.
– Réveillez-vous ! Comprenez enfin ! Connaissez donc votre caractère divin ! Il n’est nul besoin de conquérir à la force de votre ascèse une ressemblance avec Dieu. Vous êtes déjà divin, mais vous ne le savez pas. Cette connaissance vous délivrera. C’est « le Salut par la Gnose » (= connaissance).

On retrouve ici presque les formules modernistes de l’immanence vitale : Dieu demeure dans l’homme (manere in = séjourner dans), l’homme n’a qu’à retourner son regard à l’intérieur de lui-même pour l’y trouver.

L’action du Christ fut réelle, mais son humanité charnelle n’a jamais été qu’apparence trompeuse : la passion et la résurrection ne sont que des symboles sans réalité

Évidemment, un envoyé divin ne peut pas avoir subi la dégradation d’un corps matériel. Il lui a bien fallu prendre forme matérielle pour se faire connaître et pouvoir agir efficacement auprès d’hommes eux aussi prisonniers de leur corps physique.

Mais le Christ n’avait pas à racheter par une passion les péchés des hommes, puisque ceux-ci n’existent pas. Il n’y a qu’un seul péché, le « péché du monde », le péché de ce Yahvé qui a détérioré par sa création l’expansion de la divinité.

Le Christ n’est pas venu délivrer les hommes de leurs fautes : il ne leur a pas enseigné une « voie », un chemin à parcourir pour atteindre une perfection possible à venir. Il leur « a révélé », c’est-à-dire « dévoilé » ce qu’ils ne savaient pas, qu’ils étaient Dieu, déjà, depuis toujours.

Le divin qui est enchaîné dans la matière, c’est-à-dire l’âme humaine, n’est pas responsable de la chair qui l’opprime. L’esprit reste pur : il n’est point solidaire des passions, dans les fautes commises

Voilà enfin où il fallait en venir !
– Le gnostique refuse aux hommes la responsabilité de leurs actes. Puisque la matière est mauvaise, notre corps de chair ne peut produire que des actes mauvais.
– Mais ce corps est notre prison. Notre âme « étincelle divine » ne peut pas avoir le moindre rapport avec quelque mal que ce soit.

Comment expliquer tout cela ? En décomposant l’homme en trois parties :
– un corps matériel, le soma,
– une animation proprement physiologique, la psyché, et
– une âme spirituelle d’essence divine, le pneuma.

Cette structure ternaire de l’homme est une géniale invention :
– le siège des passions, la psyché est une puissance mauvaise liée à la matière qu’elle soutient dans l’existence ; il faut s’en débarrasser au plus tôt.
– Le pneuma, lui, reste impassible, spectateur indifférent des vaines agitations du corps.

Cette division ternaire de l’homme se retrouve dans l’occultisme moderne qui utilise un autre vocabulaire pour désigner les mêmes réalités : ils conçoivent
– un monde spirituel,
– un monde astral,
– un monde matériel.

L’homme est composé d’un corps, d’un double et d’une âme ! Vieux procédé pour ôter à l’homme sa véritable responsabilité et lui refuser la maîtrise de ses actes.

On retrouve dans cet exposé tout le protestantisme. Luther n’a-t-il pas affirmé que l’homme était incapable d’un acte bon, que les œuvres sont inutiles et que l’on n’est sauvé que par la foi seule ?

On retrouve encore là les premiers linéaments de la psychanalyse moderne dont la fonction essentielle est de rechercher le siège du subconscient dans la psyché, motrice des passions, et de libérer l’homme en lui dévoilant qu’il n’est pas coupable, mais toujours victime innocente de pulsions instinctives auxquelles il doit laisser libre cours puisqu’elles n’altèrent pas sa nature : libération sexuelle, etc.

Les lois écrites et les lois naturelles ont été conçues par des dieux inférieurs et ne sont pas toujours homologuées par le vrai Dieu, dont l’essence dépasse toute pensée et dont la nature est indicible

Les Gnostiques sont par définition antinomistes, c’est-à-dire qu’ils refusent toute loi.
– Un être d’essence divine n’a pas besoin de loi, celle-ci étant un moyen pour atteindre une fin. Or, l’être divin est à lui-même sa propre fin.
– De plus, une loi est reçue d’une autorité qui vous y soumet. Un être divin est totalement maître de lui et n’a nul besoin de soumission.

Cette loi naturelle dont parlent les Gnostiques est une construction arbitraire d’un esprit malveillant voulant soumettre les autres êtres à ses caprices, c’est une sujétion indigne d’une « étincelle divine ».
– Yahvé a voulu enfermer notre nature divine dans un corps matériel et nous imposer ses caprices. Voilà un grand sujet d’indignation pour nos sectaires.
– Le vrai Dieu, c’est la plénitude de la Divinité, le Plérôme. Son essence est de contenir tous les êtres, de les englober dans un immense Tout. On ne peut le définir, puisqu’il transcende toutes les limites ; il est le Grand Tout, l’Abîme innommé.
Le salut pour l’âme divine est de se perdre en lui.

On trouve dans cette dernière proposition la révolte de celui qui a prononcé le « non serviam » et qui a dit à Adam et Eve : « Eritis sicut Dei », si vous mangez de l’Arbre de la Connaissance (= Gnose).

Le culte du serpent

Il existait parmi les sectes gnostiques celle des Ophites ou Naasànes (ophis en grec et naas en hébreu signifient serpent) : ce sont les grands Gnostiques, ceux qui ont pénétré le plus avant dans le mystère des révélations :

Nous vénérons le serpent, disent-ils, parce que Dieu l’a fait cause de la Gnose pour l’humanité : il apprit à l’homme et à la femme la complète connaissance des mystères d’en-haut.

Ils s’assemblent autour d’une table, ils disposent les pains, puis ils appellent avec des incantations, le serpent qui vient se lover parmi les offrandes. Alors, seulement, ils se partagent les pains…
C’est là, prétendent-ils, le sacrifice parfait, la véritable eucharistie… (cf. fig. 1)

Ainsi, le cercle est fermé. Toutes ces élucubrations prétendument savantes sont destinées en réalité à détourner les Chrétiens de l’adoration du vrai Dieu et à les porter vers l’adoration du Serpent, suprême but de la secte : cette célébration satanique ressemble, à s’y méprendre, à la cène rosicrucienne pratiquée le vendredi saint dans les rituels maçonniques du 18e degré.

Les déficiences de la gnose

Le panthéisme

Il y a, dans l’enseignement des Gnostiques, une cascade d’incohérences qui aboutissent à des conclusions dénuées de tout bon sens. Les premiers apologistes chrétiens et les Pères de l’Église n’ont pas manqué de faire ressortir dans leur argumentation les inconséquences de leur doctrine.

Saint Irénée, par exemple, dans son Adversus Hereses, se propose de renverser tout leur système. Voici comment Mgr Freppel résume son argumentation :

Ou vous séparez Dieu du Monde, ou vous confondez Dieu et le Monde, et, dans l’un et l’autre cas, vous détruisez la vraie notion de Dieu.

Si vous placez la création hors de Dieu, en ce sens qu’elle existe indépendamment de lui, quelque nom que vous donniez à cette matière éternelle, que vous l’appeliez Vide, Chaos, Ténèbres, peu importe : vous limitez l’Être divin, vous circonscrivez le domaine de son activité, ce qui revient à le nier.

Dieu ne peut exister qu’à la condition d’être infini, de renfermer en soi l’universalité des êtres et s’il en était un seul qui pût exister par lui-même ou échapper à sa puissance, c’en serait fait de l’Être souverain.

Vous avez beau dire que le monde a pu être formé par des Anges ou par quelque autre puissance secondaire (ici le démiurge, Yahvé), de deux choses l’une :
– ou ils ont agi contre la volonté du Dieu suprême,
– ou d’après son commandement.

Dans la première hypothèse, vous accusez Dieu d’impuissance ;
dans le second cas, vous êtes ramenés malgré vous à la doctrine chrétienne, qui voit dans les Anges de simples instruments de la volonté divine.

Donc, ou admettez la Création, ou renoncez pour toujours à trouver le Dieu véritable.

Dans cette première alternative, les Gnostiques sont condamnés à inventer un Dieu vide de tout pouvoir, leur Plérôme, grand Tout indicible, inconnaissable, inconscient, non personnel. La création du monde matériel est une catastrophe maladroite d’une divinité inférieure, qui a voulu manifester son indépendance et sa volonté propre en agissant à l’insu de la Divinité-Plérôme. C’est le cas de Yahvé.

Que si, au contraire, vous placez la Création en Dieu, de telle sorte qu’elle se réduise à un pur développement de sa substance (c’est donc l’Émanation), vous entrez dans une voie encore plus inextricable.
Alors, tout ce qu’il y a dans les créatures d’imperfections et de souillures retombe sur Dieu lui-même, dont la substance devient la leur. Vous dites que le monde est un fruit de l’ignorance et du péché (le péché de Yahvé), le résultat d’une déchéance ou d’une Chute de Plérôme, une dégénération progressive de l’Être ou, suivant votre métaphore favorite, « une tache sur la tunique de Dieu » ; mais ne voyez-vous pas que, dans cette confusion de l’infini avec le fini, c’est la nature divine elle-même qui déchoit, qui dégénère, qui est entachée de vice et d’imperfection ?
Est-il possible d’altérer plus gravement la notion de Dieu ?
Vous ne pouvez échapper à cette conséquence qu’en revenant au dogme chrétien de la Création, qui, tout mystérieux qu’il est, renferme la seule solution raisonnable, parce qu’il distingue parfaitement ce qui ne doit être ni séparé ni confondu.

Telle fut l’argumentation de saint Irénée. On verra plus loin qu’elle reste toujours pertinente, même à l’égard du panthéisme moderne tel qu’il sera professé par Hegel et les Marxistes. En effet, si le Monde et Dieu ne font qu’un seul Être, il faudra introduire dans ce monde divin le mouvement, les accidents, les imperfections, le mal : le panthéisme sera nécessairement évolutionniste.

Le problème du mal

Saint Augustin nous raconte qu’il vécut quelque dix ans parmi les Manichéens, qui furent les Gnostiques de son temps :

Je croyais alors que ce n’est pas nous qui péchons, mais que c’est une nature étrangère qui pèche en nous (nescio quam aliam in nobis peccare naturam)… Je prenais plaisir à croire que je n’étais jamais coupable… J’étais bien aise de me justifier et de rejeter ma faute sur je ne sais quel principe qui était distinct de moi, quoiqu’il fût en moi (et accusare nescio quid aliud, quod mecum esset et ego non essem)… et mon péché était d’autant plus incurable que je ne croyais point être pécheur…

Or, ce je ne sais quel principe qui était en moi, tout en n’étant pas moi, c’est Dieu, source de mes fautes :

Il y a dans le ciel une cause inévitable qui fait pécher (inevitabilis causa peccandi) : c’est Vénus, Saturne ou Mars qui vous ont fait faire telle ou telle action, voulant ainsi que l’homme soit exempt de toute faute et qu’elle soit rejetée sur celui qui a créé les cieux et les astres… Or, qui est celui-là, sinon vous, mon Dieu ! (culpandus sit autem cæli et siderum creator et ordinator).

On voit par ces passages tirés des Confessions, quel usage les Gnostiques avaient fait de l’astrologie. Ce je ne sais quoi qui pèche en nous, c’est Dieu, donc « Un Autre », le grand coupable. Cependant, les Gnostiques affirment simultanément que notre Pneuma, esprit pur, est une étincelle divine et que, par là, il est parfait, incapable de quelque faute que ce soit.
Il y a là une incohérence fondamentale à propos de l’essence divine.
– Si la source du mal est dans la divinité, on ne voit pas comment l’homme, en prétendant rejoindre cette plénitude divine que les Gnostiques appellent le Plérôme, échapperait par là au mal qu’il s’efforce de rejeter sur Dieu.
– Ensuite, on ne voit pas comment un être divin donc supposé bon par nature, par exemple, Yahvé, le Créateur, aurait pu produire un effet mauvais, par exemple, la matière. Cette attribution du mal à la divinité ne résout pas la difficulté, mais ne fait que reculer le problème et le rendre insoluble.

D’où vient donc que le Créateur ait voulu cette chute des âmes dans la matière ? Les explications données par les Gnostiques sont bien hésitantes : maladresse, accident, catastrophe… et ne peuvent satisfaire un esprit quelque peu cohérent.
– Saint Augustin a mis du temps pour échapper aux attraits des Gnostiques ; mais il finit par les abandonner lorsqu’il eut compris, à la suite de ses entretiens avec l’évêque manichéen Faustus, que cette difficulté restait chez eux sans réponse.
Tertullien a fourni une réponse très intéressante à ce problème dans un Traité contre Marcion, gnostique célèbre à Rome et disciple peu fidèle des Manichéens. Voici d’abord comment il résume l’objection des Gnostiques, qui est toujours celle de nos modernes incroyants :

Si votre Dieu est bon, puisqu’il avait la prescience de l’avenir et le pouvoir d’empêcher le mal, pourquoi a-t-il souffert que l’homme, son image et sa ressemblance, ou plutôt sa substance elle-même par l’origine divine de son âme (on reconnaît là l’idée de l’âme, « étincelle divine », chère aux Gnostiques) se laissât surprendre par le démon et, infidèle à la loi, tombât dans la mort ?

Si la bonté consistait à ne rien vouloir de pareil, la prescience à ne pas ignorer l’événement, la puissance à l’écarter, jamais ne serait arrivé ce qui ne pouvait advenir avec ces trois conditions de la majesté divine.

Puisque cela est arrivé, il est donc certain que la bonté, la prescience, le pouvoir de votre Dieu, sont de vaines chimères. La chute eût-elle été possible, si Dieu était ce que vous le faites ? Elle est arrivée ; donc votre Dieu n’a ni bonté, ni prescience, ni pouvoir.

Le problème est posé dans toute son acuité et l’argumentation blasphématoire est restée inchangée jusqu’à nos jours. Voici la réponse de Tertullien. Elle est admirable :

Jamais Dieu n’est plus grand que quand il paraît petit au regard des hommes. Jamais plus miséricordieux que là où sa bonté se voile ;
jamais plus indivisible dans son unité que là où l’homme aperçoit deux ou plusieurs principes (exemple des Manichéens)…

Si l’on demande à quel titre il est Dieu, il faudra débuter nécessairement par les œuvres antérieures à l’homme (remarquons bien le sens de cette nécessité : c’est l’homme qui fait un procès à Dieu selon son jugement propre. Il faut d’abord chercher au-dessus de lui le critère de son jugement) afin que la bonté de Dieu, révélée aussitôt par lui-même et reposant depuis lors sur une base indestructible, nous fournisse un moyen d’apprécier l’ordre et la sagesse des œuvres suivantes.
[Nous dirions aujourd’hui un critère de jugement distinct de notre jugement propre, auquel cas nous serions juges et partie].

D’abord ce vaste univers par lequel il s’est révélé, notre Dieu, loin de l’avoir mendié à autrui, l’a tiré de son propre fonds, l’a créé pour lui-même.
[C’est la réponse aux Gnostiques qui présentent Yahvé comme une divinité inférieure, utilisant les âmes, « étincelles divines » éternelles pour les enfermer dans la matière].

La première manifestation de sa bonté fut donc de ne pas permettre que le Dieu véritable restât éternellement sans témoin. Qu’est-ce à dire ? D’appeler à la vie des intelligences capables de le connaître. Y a-t-il, en effet, un bien comparable à la connaissance et à la possession de la Divinité ?
[N’est-ce pas, en effet, toute la raison d’être des Gnostiques qui proposent un tel but à l’existence ?]

Quoique ce bien sublime fût encore sans appréciateur, faute d’éléments auxquels il se manifestât, la prescience de Dieu contemplait dans l’avenir le bien qui devait naître et le confia à son infinie bonté qui devait disposer l’apparition de ce bien, qui n’eut rien de précipité, rien qui ressemblât à une bonté fortuite, rien qui tînt d’une rivalité jalouse et qu’il faut dater du jour où elle commença d’agir.
[Tout ceci répond aux Gnostiques qui affirment que Yahvé créa la matière par accident, sans réfléchir aux conséquences catastrophiques de sa fantaisie, ou encore par vanité, pour montrer sa puissance aux autres divinités. On voit que Tertullien connaissait bien ses adversaires et savait, à l’occasion, leur renvoyer la balle.]

C’est elle qui a fait le commencement des choses : elle existait donc avant le moment où elle se mit à l’œuvre. De ce commencement qu’il fit, naquit le temps, dont les astres et les corps lumineux nous marquent la distinction, l’enchaînement et les révolutions diverses. Ils vous serviront de signes, a-t-elle dit, pour supputer les temps, les mois, les années.
[Tout ceci en réponse aux Gnostiques qui, fidèles disciples des astrologues, prétendaient que les planètes étaient des divinités inférieures et parfois malfaisantes.]

Ainsi, point de temps avant le temps pour celui qui a fait le temps. Point de commencement pour celui qui a créé un commencement. Ainsi, n’ayant pas commencé et n’étant pas soumise à la mesure du temps, on ne peut voir dans l’infinie bonté divine qu’une durée, immense et infinie ; on ne peut la regarder comme soudaine, accidentelle, provoquée à agir.
[Comme la bonté d’une divinité capricieuse, capable à d’autres moments d’une volonté malveillante].

Elle n’a rien qui puisse lui donner quelque ressemblance avec le temps ; elle est éternelle, sortie du sein de Dieu et, par conséquent, regardée comme sans fin et, par là même, digne de Dieu.
S’il est vrai que la bonté et la sagesse divines caractérisent le don fait à l’homme, n’allons pas, perdant de vue la première règle de la bonté et de la sagesse qui doit marcher avant toute discussion, n’allons pas, dis-je, condamner une chose d’après l’événement, ni décider en aveugle que l’institution est indigne de Dieu parce que l’institution a été viciée dans son cours, mais plutôt entrons dans la nature du fondateur qui a dû procéder ainsi : puis, à genoux devant son œuvre, abaissons nos regards plus bas.
Sans doute, quand on trouve dès les premiers pas la chute de l’homme, avant d’avoir examiné sur quel plan il a été conçu, il n’est que trop facile d’imputer à l’architecte divin ce qui nous est arrivé, parce que les plans de sa sagesse nous échappent.
[Les Gnostiques disaient bien que Yahvé était un architecte maladroit, « démiurge ».]

Mais aussitôt que l’on reconnaît sa bonté dès le début de ses œuvres, elle nous persuade que le mal n’a pu émaner de Dieu, et la liberté de l’homme dont le souvenir se présente à nous s’offre comme le véritable coupable du mal commis
[et c’est pourquoi les Gnostiques et nos modernes psychanalystes s’efforcent de nier l’existence de cette liberté, parce qu’elle connote une responsabilité].

Par là, tout s’explique. Tout est sauvé du côté de Dieu, c’est-à-dire l’économie de sa sagesse, les richesses de sa puissance et de son pouvoir. Cependant tu as eu droit d’exiger de Dieu une grande constance et une inviolable fidélité à ses institutions, afin que, le principe étant bien établi, tu cesses, Marcion, de nous demander si ces événements peuvent maîtriser la volonté divine.

Une fois convaincu de la constance et de la fidélité d’un Dieu Bon, constance et fidélité qu’il s’agit d’appuyer sur des œuvres empreintes de sagesse, tu ne t’étonneras pas que Dieu, pour conserver dans leur immutabilité les plans qu’il avait arrêtés, n’ait pas contrarié des événements qu’il ne voulait pas. En effet, si originairement, il avait remis à l’homme la liberté de se gouverner par lui-même et s’il a été digne de sa majesté suprême d’investir la créature de cette noble indépendance, point que nous avons démontré, conséquemment il lui avait remis aussi le pouvoir d’en user. Quand on accorde une faculté, s’avise-t-on d’en contraindre ou d’en limiter l’exercice ?

L’argumentation de Tertullien est remarquable en tous points. Que l’homme ne se fasse pas juge et partie : il lui faut donc un critère de jugement universel, antérieur au cas à résoudre : ce sera la perfection du monde sans l’homme.

Ensuite qu’il comprenne bien la nature d’un être intelligent, donc maître de ses actes : cette maîtrise est à la fois liberté et responsabilité, les deux faces d’une même réalité avec toutes leurs conséquences.

Et surtout que l’homme n’aille pas demander à Dieu de modifier son plan de la création, parce qu’il n’en a pas fait bon usage : ce serait pour lui un moyen de se rendre maître de la volonté divine et de lui imposer sa volonté propre à la suite de ses erreurs ; comme si un coupable, déféré au tribunal, voulait obliger le juge à modifier la loi pour l’adapter au nouvel état de fait créé par sa faute.
[N’est-ce pas d’ailleurs ce que nous voyons aujourd’hui : les lois modernes ne sont plus l’expression d’un ordre objectif des choses, mais de la pratique courante devenue habitude codifiée.]
Cette explication par le libre-arbitre suppose, pour être pleinement probante, que l’on ne fasse pas d’erreur sur la liberté. En effet, selon la philosophie du sens-commun, la volonté est soumise à l’intelligence, laquelle est soumise à la connaissance, laquelle à son tour est sous la dépendance totale de la réalité.

Ainsi, il existe un ordre objectif des choses et notre volonté peut se trouver alors en opposition avec cet ordre : c’est le mal. Parce que nous connaissons, nous pouvons penser un autre ordre que celui qui nous est donné ; nous gardons sous un certain rapport une distance avec le réel qui donne un jeu, une marge d’indétermination dans notre vouloir.

Pour obtenir une pleine liberté qui soit une indépendance totale du réel créé, les philosophes modernes vont placer la volonté à la source de l’intelligence. Ainsi l’homme devient maître du réel, il décide lui-même du bien et du mal. Bientôt, il affirmera que le mal n’existe pas. Du coup, l’homme sera libre et irresponsable.

Nous verrons ce cheminement de la pensée hérétique, depuis les Gnostiques, qui refusent la liberté pour rejeter la responsabilité, en passant par les psychanalystes qui nient l’existence du mal, supprimant du coup la responsabilité, mais libérant les pulsions, jusqu’aux marxistes qui déifient l’homme et en font le « Créateur », le moteur de l’Histoire. Mais n’anticipons pas !

Le secret initiatique

Il y a encore chez les Gnostiques une inconséquence de taille : la pratique du secret.

Nous détenons, affirment-ils, la clé du salut. Il suffit de « connaître » pour atteindre la perfection, pour être débarrassé de tout sentiment de culpabilité. Nous possédons le moyen infaillible de déculpabiliser les hommes.

Et cependant, ce moyen, ils le gardent secret ; ils le réservent à des privilégiés : les Parfaits, les Élus, les Cathares, c’est-à-dire les Purs, ceux qui ont réalisé l’Unité parfaite, qui ont reçu l’illumination, les Monoicoi, les « moines », seuls capables et dignes d’une telle Science.

La difficulté, ici, reste sans réponse au regard du simple bon sens. Quand on possède un tel bien, on veut naturellement le faire partager aux autres. La Bonne Nouvelle se crie sur les toits, à moins que l’on soit prisonnier d’un orgueil absurde : en communiquant sa science à un autre, en effet, on ne la perd pas ; bien au contraire, en la répandant autour de soi, on se grandit soi-même, au moins de toute la reconnaissance et de l’estime que l’on peut en retirer, en plus de la joie que l’on éprouve à faire partager aux autres ses convictions.

À cette difficulté, quelques apologistes chrétiens ont fait remarquer que les Gnostiques refusaient de répandre leurs écrits parce que la lecture de leurs textes, si obscurs et si indigestes, risquait de nuire à leur réputation et de détourner de leur secte beaucoup d’âmes. Certes ! Toutefois, je pense qu’il faut chercher ailleurs la vraie raison de ce secret.

Larvatus prodeo : telle est la devise du Serpent : « Je m’avance masqué ». Pour être adoré, Satan doit se couvrir du masque de Dieu lui-même. Il est « singe de Dieu ». C’est une position très inconfortable pour un être, même angélique, qui désire recevoir les hommages des autres. Si le Serpent ôtait son masque et se présentait tel qu’il est réellement, « homicide et menteur », il verrait les hommes se détourner de lui avec horreur et mépris.
Il sait bien que les marques d’adoration qu’il reçoit de ses fidèles s’adressent réellement à Dieu, mais qu’il les a détournés frauduleusement sur lui. Or, il veut être adoré pour lui-même.
Il faut donc qu’il se constitue une Église de fidèles, bien préparés à le reconnaître comme tel. Voilà la raison d’être d’une secte initiatique.
La plupart des hommes se détournent progressivement de cette secte au fur et à mesure qu’ils en voient l’orientation.

Ceux qui vont atteindre la perfection, les vrais « Élus du Dragon », auront, par je ne sais quelle aberration de l’entendement, reconnu vraiment le Serpent et lui adresseront alors, en toute « Connaissance », leurs hommages. Mais ils seront, au sens propre, possédés et non libres.

Voilà pourquoi les Gnostiques s’efforcent d’inculquer à leurs néophytes la haine du Dieu Créateur, Yahvé : c’est la condition préliminaire indispensable à toute Connaissance démoniaque.

Les différents stades de l’initiation, les divers grades maçonniques, par exemple, sont destinés à trier par éliminations successives tous ceux qui ne sont pas aptes à cette conversion à rebours.
Satan est celui qui connaît. Quand Adam et Eve eurent mangé du fruit de l’Arbre de la Connaissance (de la Gnose), « leurs yeux s’ouvrirent ». Tertullien ajoute dans son Traité contre Marcion :

Mais si Adam désobéit, il ne s’emporte point en blasphèmes contre le Créateur ; il ne censure point l’auteur dont il avait éprouvé dès l’origine toute la bonté et qu’il ne convertit en juge sévère que par une volontaire prévarication. Cela est vrai, encore un coup ! Aussi, Adam n’était-il qu’un novice en fait d’hérésie !

Il n’a pas voulu utiliser la Connaissance acquise pour se dresser contre Dieu ; il s’est enfui tout honteux. Grande déception pour le Serpent ! Il lui faudra à l’avenir préparer des âmes capables de « s’emporter en blasphèmes contre le Créateur ». C’est toute la raison d’être des Sociétés secrètes et, principalement, des Sociétés maçonniques.

La franc-maçonnerie, maîtresse de gnose

La Franc-Maçonnerie est la congrégation militante de la Gnose. Tous les Maîtres de l’Ordre, savants en science maçonnique, l’ont redit sans cesse. Il suffit pour s’en convaincre d’examiner leurs écrits, leurs manuels de base, rituels et instructions des différents grades. Mais il est nécessaire de débarrasser ces ouvrages classiques de la FM∴ de tout un fatras symbolique ou allégorique qui en rend la lecture si éprouvante pour une intelligence ordinaire. Ainsi, nous découvrirons la substance de leur enseignement et nous serons tout étonnés de nous retrouver en pays de connaissance.

La divinité maçonnique

La F∴M∴ est une Super-Religion :

dit le F∴ Albert Pike (Morals and Dogma), enseigne et a conservé dans toute sa pureté les principes fondamentaux de la vieille foi primitive, qui sont les bases sur lesquelles s’appuie toute religion. Toutes les religions qui ont existé jusqu’ici ont eu un fond de vérité et toutes l’ont recouvert d’erreurs. Les vérités primitives enseignées par le Rédempteur furent plus rapidement corrompues, mélangées et alliées à des fictions que lorsqu’elles furent enseignées aux premiers hommes.

Aussi,

La Maçonnerie, affirme le Dr Mackey, n’a aucunement la prétention de prendre place parmi les religions du monde, entendues comme sectes ou systèmes particuliers de foi et de culte, par quoi nous distinguons le Christianisme du Judaïsme…

Ainsi donc elle est la Religion universelle (et donc éminemment catholique, mais non pas romaine, car cette dernière est la religion particulière des Romains, donc une secte infestée par le microbe et les corruptions du pays et du climat romain). Elle ne demande aux initiés que l’adhésion à deux vérités fondamentales : la croyance en l’existence de Dieu et en l’immortalité de l’âme ; mais il faut bien comprendre ce que la science maçonnique entend par là.
Albert Pike nous montre « Dieu comme Père infini de tous les hommes… » ;

La Nature, ajoute-t-il, entendant par ce mot la totalité des êtres, voilà ce qui est puissant, actif, sage et bon. La Nature tire d’elle-même sa propre vie, a été, est et sera la cause de son existence, l’esprit de l’Univers et sa Providence elle-même. Il y a, certes, un plan et une volonté, desquels proviennent l’ordre, la beauté et l’harmonie : ce plan et cette volonté appartiennent à la Nature…

On peut se demander comment un être (la Nature) pourrait être cause d’elle-même et donc agir avant d’exister ? Mais peu importe !

Dieu, ajoute Albert Pike, est l’âme vivante, pensante, intelligente de l’Univers, le Permanent, l’immuable de Simon le Magicien, l’Un qui est de Platon, etc.

On voit que le savant en science maçonnique connaît les bons auteurs et s’y réfère comme à ses maîtres. Il précise même :

Tandis que l’Indien nous dit que Parabrahma, Brahm et Paratma composaient la première Trinité, que l’Égyptien adore Amon-Ra, Neith et Phta (Thot ou Hermès) et que le pieux chrétien croit que le Verbe habita dans le corps mortel de Jésus le Nazaréen… la Maçonnerie inculque sa vieille doctrine et rien de plus… D’après la Cabbale, Dieu et l’Univers ne font qu’un. Selon Pythagore, Dieu était un, une seule substance dont les parties continues se prolongeaient au travers de l’univers sans séparation. Pythagore fit ainsi de l’Univers un Grand Être, intelligent comme l’Homme, une immense divinité, ayant en soi ce que l’homme a en lui-même, le mouvement, la vie, l’intelligence. Tel est, mon Frère, le vrai Secret Royal.

Nous reconnaissons là la doctrine de l’Émanatisme, essentielle à la Gnose. Mais il est nécessaire de préciser que la référence à Pythagore s’applique à la secte néo-pythagoricienne, celle qui a composé les « Vers d’Or » dont nous avons parlé.
Le vrai nom de cette divinité maçonnique, c’est Jéhova, le tétragramme sacré, le Mot Perdu base du dogme et des mystères maçonniques. Jéhova (autre forme du mot Yahvé dans la Bible) procède par émanation, s’étend, émet des parties de lui-même dans un espace vide préparé pour les recevoir.

Mieux encore, disent nos savants en Maçonnerie, Jéhova, c’est l’homme lui-même, Adam-Kadmon, l’Archétype (nous dirions, aujourd’hui, le Prototype) de l’Humanité, la première émanation de la divinité, le « Fils de Dieu ». Ainsi…

… c’est l’Humanité qui crée Dieu, dit le F∴ Pike, et les Hommes croient que Dieu les fit à son image, parce qu’ils le font à la leur.

Nous comprenons bien par cette formule que la Divinité maçonnique se crée elle-même en s’étendant sous les formes humaines qui sont les plus parfaites émanations du Grand-Être.
Mais ne confondons pas ! Le « Jéhova », divinité maçonnique, n’a rien à voir avec le « Jéhova » de la Bible, l’autre nom de Yahvé, celui du Dieu créateur. En effet…

… La divinité de l’Ancien Testament, dit encore Albert Pike, toujours dans Morals and Dogma, est partout représentée comme l’auteur direct du Mal, dépêchant aux hommes des esprits mauvais et trompeurs. (Entre parenthèses, il s’agit des anges et des prophètes)… Le Dieu de l’Ancien Testament et de Moïse est ravalé au niveau des passions humaines… c’est une divinité violente, jalouse, vindicative, autant qu’ondoyante et irrésolue ; elle commande des actes odieux et révoltants de cruauté et de barbarie…

La haine du Dieu Créateur est la pierre de touche, le caractère spécifique de toute Gnose, et c’est un blasphème ! La F∴M∴ l’a emprunté à la Gnose.

L’âme humaine

L’Âme, dit toujours Albert Pike, est d’une nature divine, ayant pris son origine dans une sphère plus voisine de la divinité et y retournant lorsqu’elle est débarrassée de la dépouille du corps et ne pouvant y rentrer que purifiée de toutes les souillures du péché qui se sont pour ainsi dire incorporées à sa substance par suite de son union avec le corps…
Le Maçon qui possède le Secret Royal peut montrer que l’âme, lorsqu’elle aura été dépouillée de la matière qui l’entoure et qui l’a subjuguée, lorsqu’elle aura été débarrassée de la gangue qui la déforme, retrouvera sa vraie nature et s’élèvera par degrés, au moyen de l’échelle mystique des sphères (ce sont les éons de nos gnostiques) pour regagner son premier séjour, son lieu d’origine.

Tout commentaire affaiblirait la force de telles affirmations qui sont recopiées directement sur les ouvrages gnostiques.

Le grand architecte de l’univers

La Maçonnerie s’est proposé pour finalité la reconstruction du Temple de Jérusalem, c’est-à-dire la reconstruction de l’Humanité.
Pourquoi reconstruire ? Sinon parce que le premier démiurge, Yahvé, avait raté sa création. Reconstruire l’Humanité pour le Maçon conscient et profondément initié, c’est réaliser le retour à l’Unité des âmes dispersées dans les corps, c’est parfaire la Divinité primitive, en achever la plénitude, c’est le « Grand Œuvre ».

Aussi l’initiation constitue-t-elle un « choc illuminatoire ». Par son initiation, l’illuminé « ouvre les yeux », voit enfin dans sa religion les corruptions qui ont déformé la révélation primitive et …

… pénètre dans la Vérité, après avoir erré parmi les erreurs, tout couvert des souillures du monde extérieur et profane…

Il faut donc purifier l’Humanité et la reconstruire selon le plan d’un architecte divin. Que l’initié prenne son tablier, s’arme du compas, de la truelle, de l’équerre et du triangle et qu’il se mette au travail :

Notre travail constitue notre culte.

Mais pour cela, il faut procéder avec ordre ; il faut connaître la science de la géométrie. Le frère initié est un bâtisseur du Temple de l’Humanité, il lui faut un architecte, un Grand Bâtisseur, un Grand Géomètre :

Le Grand Architecte de l’Univers … C’est un contremaître, sous les ordres duquel nous devons travailler comme des ouvriers.

Certes, il est divin, tout comme l’Homme après son Illumination par le rite de l’initiation ; mais il n’est pas la Divinité totale, le « Jéhova ».

La F∴M∴, dit Oswald Wirth, dans son Livre du Maître, se garde bien de définir le Grand Architecte de l’Univers et laisse à chacun de ses adeptes pleine latitude pour s’en faire une idée conforme à sa foi ou à sa philosophie. Gardons-nous donc de céder à cette paresse d’esprit qui confond le Grand Architecte des Initiés avec le Dieu des Croyants.

Voilà qui est clair : il ne faut surtout pas définir la nature de cet architecte et ne pas lui donner un nom qui permettrait de l’identifier.
Mais les vrais Initiés, les « Maîtres du Sublime Secret », ceux qui ont pénétré le plus avant dans les mystères du Grand Art royal, connaissent bien son nom.

Le Serpent, dit Oswald Wirth, dans son Livre du Compagnon, inspirateur de désobéissance, d’insubordination et de révolte, fut maudit par les anciens théocrates, alors qu’il était en honneur parmi les Initiés. Ceux-ci estimaient, en effet, qu’il ne saurait rien y avoir de plus sacré que les aspirations qui nous portent à nous rapprocher progressivement des Dieux envisagés comme les puissances conscientes, chargées de débrouiller le chaos et de gouverner le monde. Rendre semblable à la divinité, tel était l’objet des anciens mystères. De nos jours, le programme de l’initiation n’a pas changé.

Ainsi donc, le Serpent est appelé par les Grands Initiés à débrouiller le chaos d’un monde mal fait par un démiurge maladroit, pour le reconstruire selon un plan parfait, celui du Grand Temple de l’Humanité et ainsi …

… nous parviendrons à réaliser le dernier mot du Progrès, l’Homme, prêtre et roi de lui-même, qui ne relèvera que de sa volonté et de sa conscience (Ragon, Cours philosophique).

 

 

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