Les parlements sont des cours établies par la monarchie pour aider le souverain à s’acquitter de son devoir de rendre la justice. Les magistrats sont tenus d’acheter leur charge, et cette vénalité des offices contribue à renflouer les caisses de l’État. Cependant le système se dévoie au fil du temps : charges devenues quasi héréditaires, inflation du nombre des magistrats, baisse notable de leurs compétences, corruption en augmentation, frondes des cours contre l’autorité royale. Au cours des siècles, les ministres imaginent différentes sanctions destinées à recadrer les cours rebelles, mais elles se révèlent inefficaces sur la durée. Il faut attendre la fin du règne de Louis XV pour que la réforme du chancelier de Meaupou offre enfin une solution habile pour limiter les conflits entre les parlements et le roi de France. [La Rédaction]
Table des matières
Introduction de Vive le Roy
Le texte qui suit est une reproduction de l’intervention lors d’un colloque universitaire de Michel Antoine intitulée : Sens et portée des réformes du chancelier de Maupeou.
AVERTISSEMENT : tous les titres ont été ajoutés par VLR pour faciliter la lecture en ligne.
De la réforme nécessaire des cours de justice
Par son caractère radical et parce qu’il couronnait un conflit bruyant et explosif, le coup de majesté par lequel Louis XV et le chancelier de Maupeou entreprirent en 1771 la refonte des institutions judiciaires du royaume a vivement impressionné les contemporains et les historiens. Mais les circonstances qui, sur le moment, poussèrent le Roi et son ministre à le déclencher ont d’ordinaire retenu si exclusivement l’attention, que les causes immédiates de l’événement ont éclipsé ses origines profondes, issues de la décrépitude du système judiciaire de la monarchie.
Au cours des règnes antérieurs, les rois et la haute magistrature s’étaient maintes fois affrontés, mais les sanctions collectives prises contre les compagnies rétives ou rebelles, plus ou moins efficaces à court terme, s’étaient toujours révélées inopérantes à plus longue échéance.
Depuis l’avènement de Louis XV, en plusieurs occasions déjà, la subversion endémique des cours supérieures avait fait reprendre ou imaginer des projets tendant à les réformer, voire à en supprimer telle ou telle. Mais le pouvoir royal semblait condamné à rechercher toujours ou vain la solution qui lui permettrait de frapper juste et de maîtriser en bonne foi ces corps inlassablement récalcitrants.
Le génie de Maupeou fut de déceler la vraie raison de cette impuissance et de s’y attaquer. Le rappel des tentatives passées mettra en lumière la lucidité et l’originalité de sa démarche.
Diverses sanctions envers des cours rebelles
À diverses reprises entre le XVIe et le XVIIIe siècle, les souverains ont frappé de peines collectives sévères et parfois spectaculaires des cours supérieures qui leur avaient gravement désobéi ou qui, dans des circonstances critiques, avaient gravement comportement douteux.
Dans les faits, ces sanctions se ramenèrent à une alternative : les compagnies visées furent soit frappées d’interdiction ou suspension, soit condamnées à aller siéger dans une ville autre que celle de leur résidence ordinaire.
Les peines de suspension et d’interdiction
Le parlement de Rouen sous François 1er
En septembre 1540, mécontent de la justice rendue par le parlement de Rouen, François Ier suspendit ses séances et ne revint sur cette décision qu’à la fin de l’année, en maintenant toutefois l’interdiction contre neuf conseillers1.
Les révoltes parlementaires sous Henri II
Plus saisissantes et de plus longue durée furent les sanctions prises en 1548 contre le parlement de Bordeaux. Henri II lui reprochait d’avoir mal défendu son autorité au cours de la révolte de la gabelle, qui avait soulevé le Poitou, la Saintonge, l’Angoumois, la Guyenne et la ville même de Bordeaux, où le lieutenant général de la province, représentant la personne du Roi, avait été massacré par les émeutiers.
Pour rétablir l’ordre, Henri II envoya par le Poitou des troupes commandées par le duc d’Aumale, qui devaient opérer devant Bordeaux leur jonction avec celles conduites d’autre part par le connétable de Montmorency, lequel avait reçu pleins pouvoirs pour juger les mutins, supprimer les privilèges de la ville et interdire ou transférer le parlement2.
Montmorency, en effet, le suspendit dès son entrée dans Bordeaux le 20 octobre 1548 et, pour rendre la justice à sa place, installa des magistrats tirés des parlements de Paris, Rouen et Aix3. La répression fut d’une extrême sévérité et se termina par un compromis incluant la levée de l’interdiction du parlement, prononcée par le Roi le 28 décembre 15494.
Le parlement d’Aix sous Charles IX
Sans l’accompagner de peines aussi terribles, Charles IX sévit de la même manière en 1563 contre le parlement d’Aix, qui rechignait à observer et faire observer l’édit de pacification d’Amboise : il fut suspendu le 24 novembre 1563 et des conseillers du Grand Conseil, du parlement de Paris et d’autres cours furent commis pour se substituer à lui5.
Situation qui dura jusqu’à ce que, au cours de sa grande tournée à travers le royaume, le Roi, à son passage en Provence, rétablit le parlement dans ses fonctions en décembre 15646.
Le parlement de Rouen sous Louis XIII
De telles sanctions ne se rencontreront plus avant le règne de Louis XIII.
Les plus fracassantes furent subies à la fin de 1639 par les juridictions rouennaises pour accompagner la répression du soulèvement des Nu-Pied et autres révoltes normandes. Simultanément furent alors frappés d’interdiction le bureau des finances7, le parlement8, la cour des aides9, le corps de ville10 et, à titre personnel, le lieutenant général du bailliage de Rouen11.
Les 4 et 7 janvier 1640, des conseillers d’État et des maîtres des requêtes, ensuite des officiers du parlement de Paris furent chargés de tenir celui de Normandie. Toutes mesures exécutées sous l’impulsion et la surveillance du chancelier Séguier, envoyé sur les lieux par Louis XIII pour présider au rétablissement de l’ordre et au châtiment des rebelles12.
La levée de ces interdits se fit attendre : consentie en janvier 1641 pour la cour des aides13 et le parlement14 et le 31 mars suivant pour le corps de ville15, elle ne devint effective qu’après l’enregistrement en avril des actes qui l’avaient prononcée.
Le parlement n’en continuait pas moins à subir le ressentiment royal : en étant rétabli, il voyait son service scindé en deux semestres. Motivée officiellement par le souci d’accélérer l’expédition des procès, cette mesure — outre qu’elle alimenterait le Trésor grâce à la vente des offices ainsi créés — visait en fait à lézarder la cohésion et l’unité d’un corps rétif.
Elle ne fut appliquée qu’avec peine. Les parlementaires normands ne s’y résignèrent jamais et, à force d’instances et de manœuvres, finirent par en obtenir la révocation au début de la minorité de Louis XIV16. La restauration de ces semestres en septembre 164517 les indisposa de nouveau, au point de leur faire prendre le parti de la Fronde à la suite du duc de Longueville.
Les parlements de Bordeaux et de Dijon sous Louis XIV
La Fronde, précisément, valut au parlement de Bordeaux d’être, dans ces années si troublées en Guyenne, l’objet de sanctions diversement appliquées, où s’entremêlèrent suspensions et relégations. Frappé d’interdiction le 12 juillet 1649, puis derechef le 10 décembre 1651, une déclaration du 8 octobre 1652 le transféra à Agen, d’où, chassé par la peste, il émigra à La Réole, pour ne reprendre ses séances à Bordeaux que le 1er décembre 165418.
Des survivances d’esprit frondeur à Dijon incitèrent Louis XIV et Mazarin à s’y arrêter, dans leur route vers Lyon avec la cour, pour tenir un lit de justice où, le 18 novembre 1658, le parlement dut enregistrer plusieurs édits fiscaux. Le lendemain même, il considéra cette formalité comme nulle et s’opposa à l’exécution de ces édits. Outre les punitions personnelles alors infligées à certains magistrats, la compagnie fut châtiée le 28 décembre par une interdiction levée le 7 juin suivant19, durant laquelle les causes pendantes devant elle avaient été évoquées au Grand Conseil.
La peine de l’exil dans une autre ville
De la nécessité d’un nouveau type de sanction
Toutes ces interdictions ou suspensions, si impressionnantes que certaines aient été, ne pouvaient être que temporaires, car l’interruption ainsi provoquée dans le cours de la justice aurait troublé trop profondément la vie d’une province pour être longtemps maintenue.
Il était fatal que les palais de justice retrouvent leur activité coutumière. D’où le recours à une seconde solution consistant, sans interrompre le fonctionnement d’une cour, à la punir en l’envoyant siéger hors de sa résidence ordinaire. Procédé qui pénalisait lourdement les juges et leur famille et aussi les avocats, les procureurs et toute la basoche, souvent solidaires de la magistrature dans ses écarts, mais ne lésait pas les justiciables et, par suite, pouvait être appliqué pendant des années.
L’exil de plusieurs cours de Provence en 1630
Lors des troubles de Provence en 1630 et 1631, les relégations prononcées contre la cour des comptes, aides et finances (envoyée à Toulon, puis à Saint-Maximin), le parlement (transféré à Brignoles), le bureau des finances (muté à Pertuis) et la sénéchaussée d’Aix (exilée à Lambesc) ne purent guère recevoir d’exécution20.
L’exil du parlement de Dijon en 1637
Quant au parlement de Dijon, expulsé de cette ville le 2 avril 1637 par le prince de Condé, gouverneur de Bourgogne, pour son refus d’enregistrer certains édits, il put, un mois plus tard, la réintégrer21.
L’exil du parlement de Metz en 1636
Le parlement de Metz connut, dans le même temps, le même sort, mais combien plus durable ! Créé seulement en 1633, il s’entendit bientôt si mal avec le cardinal de La Valette, gouverneur du pays, que, le 10 mai 1636, Louis XIII lui enjoignit de se transporter à Toul dans les huit jours. À quoi il opposa si bien la force d’inertie, qu’il fallut faire fermer et garder le palais.
Il finit par se soumettre le 7 avril 1637 et son séjour à Toul dura près de vingt-deux ans22.
L’exil des parlements de Bretagne et de Guyenne en 1675
La même épreuve s’abattit un peu plus tard sur les parlements de Bretagne et de Guyenne, victimes de leur comportement lors de la révolte du papier timbré. Louis XIV envoya le premier siéger à Vannes en septembre 1675 et ne l’autorisa qu’en octobre 1689 à revenir à Rennes23.
Quant au parlement de Bordeaux (encore lui !) il fut transféré en novembre 1675 à Condom, puis passa l’année suivante à Marmande, d’où, fuyant une épidémie, il se retira en mai 1678 à La Réole, pour ne rentrer à Bordeaux qu’en 169024, la cour des aides de cette ville ayant été de son côté reléguée à Libourne.
Une amande pour obtenir le droit de revenir
Encore, dans ces trois derniers cas, le retour du parlement dans ses meubles fut-il chaque fois comme acheté par ses bénéficiaires : en 1658, les magistrats évêchois versèrent 200 000 livres au trésor de l’Épargne pour rentrer en grâce auprès de Mazarin et, en 1689 et 1690, leurs collègues bretons et gascons n’obtinrent de regagner Rennes et Bordeaux qu’en se résignant le uns et les autres à la création d’offices nouveaux dans leur compagnie : un président à mortier et six conseillers nouveaux25.
On aura remarqué que le parlement de Paris semble jusque-là avoir échappé en général à de tels coups. Toutefois, pendant la Fronde, il fit l’objet d’une courte translation à Pontoise26.
Le constat de sanctions inefficaces
Quelles conclusions l’examen de tous ces précédents put-il après 1715 inspirer au Régent d’abord, puis à Louis XV, lorsqu’ils affrontèrent l’obstruction ou la rébellion des cours supérieures ? C’était que l’interdiction et la relégation, ces deux sanctions collectives pratiquées aux XVIe et XVIIe siècles à leur encontre étaient, en fin de compte, inaptes à les dompter de façon définitive.
Inévitablement, il avait fallu les lever tôt ou tard, les choses avaient alors été remises sur leur ancien pied, ce pourquoi les mêmes situations conflictuelles qui en avaient été l’occasion resurgissaient périodiquement. D’où, sans renoncer tout-à-fait à ces solutions traditionnelles, le dessein de les améliorer, puis d’en rechercher d’autres plus durables, voire plus radicales.
La situation sous le règne de Louis XV
L’obstruction du parlement de Paris en 1720
Peu d’années après que le Régent, avec beaucoup d’imprudence, eut affaibli les précautions prises par Louis XIV pour préserver l’autorité royale de tout empiétement des cours supérieures, le parlement de Paris, suscita de tels embarras à Law que le prince n’hésita pas à transférer cette cour à Pontoise le 21 juillet 172027.
Elle ne s’y montra pas plus docile, y durcit sa résistance en refusant d’enregistrer la déclaration du 4 août 1720 ordonnant l’observation de la bulle Unigenitus, en sorte que, le 11 novembre, Philippe d’Orléans décida de la reléguer à Blois.
Mesure non exécutée, son annonce et la déconfiture de Law ayant eu raison de l’obstination des magistrats, bientôt rappelés dans la capitale28. Épisode assez banal, mais, relate Barbier, il y eut dans ces circonstances. ..
… des Conseils violents contre le parlement. On dit même que la suppression avoit été passée pendant quelque temps et que l’on en feroit deux à Tours, à Poitiers ou à Lyon. M. le Duc étoit de l’avis de la suppression, mais MM. les ducs et pairs s’y sont opposés, attendu que c’est leur premier privilège que d’avoir séance au parlement, qui est la cour des pairs. Il avoit été agité, pour les indemniser, de faire une chambre des pairs, mais cela avoit de grands inconvénients29.
Comme bien souvent, ce chroniqueur se révèle informé avec exactitude : on trouva, en effet, dans les papiers abandonnés par Law lors de sa fuite un « Projet pour la désunion de la cour des pairs de France d’avec le parlement de Paris30 ». Projet abandonné, sa réalisation risquant d’accroître plutôt que de restreindre les inconvénients auxquels il entendait parer, mais néanmoins envisagé un moment avec sérieux.
Suppression envisagée de la cour des comptes, aides et finances de Dole en1724
D’autres cours, notamment celles des aides, cœxistaient avec les parlements. Si elles étaient moins prestigieuses qu’eux, à la fois parce qu’ils supportaient mal de partager avec elles la prérogative de juger en dernier ressort et parce qu’elles traitaient moins d’affaires, elles n’étaient pas moins fort capables d’entrer en conflit avec le pouvoir royal.
Ce fut pourtant en une période de grand calme, en 1724, qu’il fut proposé de supprimer la cour des comptes, aides et finances de Dole en l’unissant au parlement de Besançon. L’extinction de nombreux offices dans une province où il n’y en avait que trop était l’avantage escompté de cette opération.
La suggestion n’émanait pas des ministres, mais, selon toutes les apparences, du parlement, désireux de s’assurer le monopole de la juridiction suprême en Franche-Comté31. Aussi ne fut-elle pas prise en considération, sans qu’on put alors prévoir qu’elle referait surface en des temps plus houleux.
L’opposition du parlement de Paris en 1732
Les disputes autour de la bulle Unigenitus suscitèrent en 1732 une tension si vive entre le Roi et le parlement de Paris, que celui-ci fut menacé et même, en grande partie, frappé de sanctions collectives. Ses premiers écarts donnèrent lieu dans le Conseil des Dépêches à des débats très animés, où, détail important, certains se prononcèrent pour sa suppression. Villars rapporte, le 16 juin, que :
– le chancelier d’Aguesseau « opina à punir de prison » un président et trois conseillers ;
— le contrôleur général [Orry] parla longtemps et finissoit par dire que, si le parlement continuoit dans sa désobéissance, il falloit le détruire ;
– d’Angervilliers, à en punir jusqu’à six et supprimer leurs charges,
– Saint-Florentin, de l’avis du chancelier ;
– Maurepas parla longtemps et concluoit comme le contrôleur général.
– Le maréchal de Villars dit que, pour détruire le parlement, ce ne seroit jamais son avis,. .. mais qu’il falloit que le Roi fût obéi32.
On se contenta d’arrêter quatre mutins. Comme l’effervescence continua, le chancelier, rapporta Barbier, confia, au début de juillet, au premier président, que l’intention du Conseil était « de confisquer les charges, de dégrader de noblesse et de les renvoyer tous à trente lieues des maisons royales », mais ces propos n’étaient « que pour les intimider33 ». Sans succès.
Aussi Louis XV dut-il tenir le 3 septembre un lit de justice pour faire enregistrer un règlement de discipline. Dès le lendemain, les magistrats des chambres des enquêtes et des requêtes lui adressèrent leur démission. D’où encore de vives discussions au Conseil, où d’aucuns prônaient la translation de la compagnie à Pontoise, d’autres l’exil des démissionnaires. Villars, de nouveau, opina que…
… il falloit éviter, autant qu’il seroit possible, de détruire le parlement, qu’une telle rigueur pouvoit être dangereuse et feroit un très mauvais effet dans les pays étrangers. Le duc de Charost vouloit la perte du parlement. Il y eut quelque vivacité entre lui et le maréchal de Villars… Le garde des sceaux et le chancelier furent de l’avis du maréchal34.
Finalement, puisque la grand’chambre n’avait pas cessé son service, on n’exila à travers le royaume que les cent trente-neuf démissionnaires.
Diverses tractations, et notamment la promesse de mise en sommeil du règlement de discipline, aboutirent, le 11 novembre 1732, à la levée des exils et, le 1er décembre, à la rentrée du palais.
L’épisode était peu concluant, ou plutôt il était peu flatteur et peu encourageant pour l’autorité royale, car rien ne prouvait qu’il n’aurait pas un jour sa répétition.
La fronde du parlement de Paris de 1756
Vingt ans plus tard, en effet, la même situation se reproduisit, et aggravée. Le parlement de Paris ayant cessé le service plutôt que d’obtempérer à l’injonction de Louis XV de surseoir aux poursuites pour refus de sacrements, le Roi, les 9 et 11 mai 1753, exila çà et là les officiers des enquêtes et des requêtes et transféra la grand’chambre à Pontoise.
Dans le palais de la Cité devenu vide, il commit des conseillers d’État et des maîtres des requêtes pour tenir, d’abord en septembre, une chambre des vacations, puis en novembre (la grand’chambre étant alors exilée à Soissons) une chambre royale, appelées à rendre la justice au lieu du parlement, pour lequel la réussite de cette juridiction formée avec un personnel nouveau eût constitué une grave menace.
Celle-ci fut déjouée : les tribunaux subalternes, Châtelet en tête, refusèrent de la reconnaître, les avocats, les procureurs, les basochiens et, par suite, les plaideurs la boudèrent, en sorte que, son activité confinant au néant, le Roi la supprima à la fin d’août 1754. Échec prometteur d’incidents à venir. Ils ne tardèrent pas et les cours des provinces s’y mirent en vedette autant, voire davantage, que celles de la capitale.
Les turbulences de la cour des aides de Montauban en 1756
L’année 1756 est exemplaire à cet égard. La cour des aides de Montauban s’y signala, en particulier, par sa turbulence35. Dotée d’un personnel surabondant36, c’était en fait une cour assez chétive, qui ne rendait guère plus de soixante-dix décisions par an et où le contentieux fiscal dépassait rarement une trentaine d’affaires. Avec ces effectifs pléthoriques et une activité aussi médiocre, ses officiers, aigris par le sentiment de leur inutilité et l’effondrement du prix des offices, furent portés, pour restaurer aux yeux du public la notion de leur rôle et le prestige de leur compagnie, à se mêler des affaires publiques, et cela en tracassant l’intendant de la généralité au point que le Roi résolut de sévir.
La cour des aides de Montauban va être cassée, à ce que « ministres ont déclaré, nota le marquis d’Argenson le 21 février 1756. M. de Séchelles37 a dit que le remboursement n’étoit que de huit cent mille livres et qu’elle coûtoit annuellement au Roi soixante mille livres38.
L’imminence de la guerre extérieure fit renoncer à cette suppression et on se limita à punir individuellement les magistrats les plus contestataires.
La fronde du parlement de Paris et autres cours en 1756
En cette même année 1756, les affrontements entre Louis XV et les autres cours, notamment le parlement de Paris, furent si nombreux et si vifs qu’il en résulta une tension politique extrême. D’une part, elle suscita la pulsion criminelle de Damiens et, d’autre part, fit prôner des moyens radicaux d’en finir avec la rébellion endémique de la haute robe.
L’on assure, écrivait d’Argenson le 6 décembre 1756, que l’on va voir le Roi… rompre les parlements39.
Le parti est pris, annonçait-il à la fin du mois, de rembourser le parlement de Paris en partageant son ressort entre deux parlements voisins… D’autres disent que l’on va faire venir à Paris le parlement de Douai pour remplacer celui de Paris39.
Au même moment, d’après Barbier, on colportait …
… que M. le maréchal de Belle-Isle, homme à projets et d’un grand détail, a proposé un système de suppression de tous les parlements du royaume, apparemment avec le remède nécessaire à une pareille entreprise, qui ne paroît pas être facile dans l’exécution40.
En fait, si l’on se fie au témoignage postérieur de Bourgeois de Boynes, Belle-Isle, suivi en cela par M. d’Ormesson, intendant des finances, préconisait la réunion des états générauxJournal inédit de Bourgeois de Boynes (à M. le marquis de Boynes).. C’était, certes, le moyen le plus sûr de paralyser et désarmer l’opposition des magistrats. Ces avis fut-il connu de Louis XV ? On l’ignore. Mais, quoi qu’il en ait été, une telle suggestion attestait que, dans les milieux dirigeants, certains en étaient venus à penser qu’aux grands maux il fallait maintenant de grands remèdes.
Les turbulences de la cour des comptes, aides et finances de Dole en 1757
Sans inspirer des solutions aussi drastiques, l’attitude de la cour des comptes, aides et finances de Dole fit renaître des projets menaçants pour elle. Sa situation rappelait beaucoup celle de la cour de Montauban, avec un personnel plus nombreux que ne le requérait l’expédition des affaires
Huit présidents (dont le premier), cinq chevaliers d’honneur, deux conseillers d’honneur ecclésiastiques, trente-quatre maîtres, neuf correcteurs, douze auditeurs, un procureur général, deux avocats généraux, un greffier en chef et quelques officiers de moindre rang.
. Elle put ainsi prendre une part si active à l’agitation que le parlement de Besançon entretenait dans la province, notamment en refusant de déférer aux arrêts du Conseil, qu’à la fin de 1757 le chancelier de Lamoignon proposa de la supprimer en attribuant sa juridiction au parlement :
Il me paroist, disait-il, qu’on ne peut pas doutter de l’utilité de la réunion, parce qu’elle diminuera le nombre des privilègiés dans la province… Peut-estre serés-vous touché d’une autre considération, qui vient de la manière dont cette chambre s’est conduite dans les derniers temps41.
L’intendant était du même avis42. Désormais la suppression de cette compagnie ne cessa plus d’être agitée, d’autant plus que son palais tombait en ruine et que se posait la question de savoir s’il importait de reconstruire un édifice appelé à perdre éventuellement sa raison d’être.
Au début de 1762, ce fut son premier président en personne qui écrivit au chancelier pour se rallier à cette idée, et cela par une suggestion remarquable :
En supprimant, disait-il, le parlement et la cour des comptes, aides, domaines et finances pour créer un nouveau corps qui fût tout, comme est le parlement de Metz, on éteindroit facilement la division ; on soulageroit le peuple par la suppression de beaucoup de charges inutiles ; les règlements de juges, les conflits de jurisdiction seroient épargnés aux parties ! Tant de bien me paroîtroit naistre de ce projet, que je ne balancerois pas à imiter le Codros d’Athènes43.
Indignation générale envers les rébellions des cours
Anéantir des compagnies adonnées de façon systématique à l’insubordination et, en outre, d’une utilité douteuse, ce projet n’était pas caressé que par des ministres ou de hauts magistrats, il faisait aussi son chemin dans le public. À preuve, ces réflexions adressées en juillet 1756 au chancelier par un huissier du Conseil dépêché à Bordeaux pour y signifier des arrêts au parlement en pleine rébellion :
J’ay déjà pris la liberté de mander à Votre Grandeur que
– les habitans de cette province n’épousoient en aucune façon l’affaire du parlement,
– qu’il ne jouissoit pas même de la considération que le bien publique engageroit à désirer qu’il eût ;
– que le Roy pouvoit que ordonner contre ce parlement sans craindre la moindre fermentation dans la province et
– qu’il n’y avoit pas un membre du parlement qui pût se consoler s’il cessoit d’être ce qu’il est…Les parlemens ont été créés par les roys à mesure de l’agrandissement et des besoins de l’État. Dans les parties du royaume où il n’y en a point été créés, il a été établi des conseils supérieurs. Par conséquent, il semble que la suppression d’un parlement et établissement à sa place d’un conseil supérieur ne changeroit rien à la constitution de l’État.
Cela posé, on pourroit, par des lettres patentes, ordonner au parlement de Bordeaux de reprendre ses fonctions à peine de désobéissance et d’encourrir l’indignation du Roy.
En cas que le parlement encourût la peine de désobéissance, il paroist qu’elle devroit être suivie d’un édit de suppression du parlement (sans remboursement d’offices) et d’un édit de création d’un conseil supérieur dans une des principales villes du ressort, comme Agen ou Périgueux… et, afin une les sujets ne soufrisent point de la vacance qu’il y auroit entre la suppression du parlement ne l’entier établissement du conseil supérieur, les présidiaux, chacuns dans leur arrondissement, pouroient juger des apels. Il paroist que ce party guériroit les autres parlemens de la tentation de quitter le travail44.
À la date où elle était avancée, cette suggestion avait peu de chances d’être retenue : la France venait d’entrer en guerre, circonstance peu propice à des réformes internes aussi radicales. Ce fut néanmoins au cours de ce conflit que le chancelier de Lamoignon dut lui-même envisager ailleurs d’éventuelles que punitives.
La fronde des parlements de 1760
En 1760, le parlement et, plus encore, la cour des comptes, aides et finances de Rouen partirent en campagne contre l’autorité du Roi en attaquant les intendants de Normandie (surtout celui de Cæn) à l’occasion de la corvée des chemins. Scandalisé par cette fronde des deux compagnies normandes, Lamoignon fut naturellement incité à se référer aux mesures exécutées contre elles par son prédécesseur Séguier45. Dans un mémoire qu’il lut à Louis XV dans son Conseil des Dépêches au mois d’août 1760, il prévoyait d’interdire la cour des aides comme en 1639, où sa compétence avait été déférée à celle de Paris, mais, observait-il :
Il peut estre à craindre que la cour des aydes de Paris ne veuille pas accepter le renvoy qui luy sera fait. Les esprits de cette compagnie, comme ceux de toutte compagnie de justice, sont disposés d’une autre manière qu’ils ne l’estoient il y a cent ans.
Par suite, il suggérait d’attribuer ses causes à l’intendant de Rouen. D’autre part, cour des aides et chambre des comptes de Normandie ayant été fusionnées en 1705, il conviendrait maintenant, en cas d’interdiction, de renvoyer les comptes devant la chambre de Paris. Il entendait aussi interdire le parlement de Rouen comme en 1639. Il avait alors été remplacé par de gens du Conseil, puis par des magistrats du parlement de Paris45. Mais…
on doutte que des officiers du parlement de Paris voulussent aujourd’huy accepter une pareille commission. Peut-estre ceux du Grand Conseil ne seroient-il pas éloignés de l’accepter. C’est sur quoy on peut les sonder. Voylà le grand inconvénient qui résultera de l’interdiction du parlement de Rouen. Il y a quelques années, il se seroit présenté des magistrats pour remplacer ceux qui seroient supprimés, mais l’expérience du passé fait craindre qu’aucune personne ne veuille remplacer les officiers du parlement de Rouen.
Le chancelier craignait en outre que les juridictions subalternes de Normandie ne fassent cause commune avec leurs cours et que, par solidarité avec le parlement de Rouen interdit, celui de Paris n’en vienne à cesser le service46. Rien de plus révélateur que cette perplexité de Lamoignon, constatant que, séparées par cent-vingt ans, les deux situations étaient peut-être assez analogues, mais non superposables, et doutant de la possibilité de reprendre contre les cours normandes les sanctions infligées jadis par Louis XIII.
Peut-être ces considérations embarrassantes inspirèrent-elles vers le même temps dans l’entourage du contrôleur général Bertin des propositions mieux appropriées visant les parlements de Rouen et de Toulouse : non seulement les frapper ensemble d’interdiction, mais leur intenter en corps en procès en félonie devant une juridiction présidée par le chancelier et composée des pairs de France, de la grand’chambre, de la tournelle et de douze conseillers des enquêtes du parlement de Paris. Le Roi évoquerait à soi les causes pendantes devant les deux compagnies interdites et renverrait devant le parlement de Paris celles du ressort de Normandie et devant la cour des comptes, aides et finances de Montpellier celles du ressort de Languedoc.
L’auteur de ce plan ne dissimulait pas que sa mise en œuvre risquait de mettre en grève et en combustion tous les parlements du royaume, crise que le Roi ne pourrait dénouer que par un grand acte de gouvernement imposant une réformation générale de ces cours, en attendant laquelle les présidiaux, garnis d’officiers de renfort, seraient habilités à juger en dernier ressort47. Plus réaliste que bien des projets antérieurs, celui-ci souffrait d’être présenté en pleine guerre et, par suite, irréalisable avant une paix solide.
C’est pourquoi les peines infligées en 1763 aux parlements de Dauphiné et de Languedoc ne furent que des variantes des précédentes : à Toulouse, le commandant en chef mit les parlementaires aux arrêts à leur domicile et leurs collègues grenoblois furent dispersés entre les villes de Fontainebleau, Melun et Nemours48. Ces sanctions ne durèrent que quelques mois, et, rendus à leurs fonctions, ceux qui les avaient subies n’avaient plus qu’à se mettre en état d’en mériter d’autres.
La nouvelle politique du Chancelier Maupeou
Le vice-chancelier de Maupeou, appelé à la chancellerie en octobre 1763 lors de la disgrâce du chancelier de Lamoignon, est-il à l’origine d’un changement remarqué ensuite dans les réactions du pouvoir royal ? Ou bien son fils, comme il s’en serait vanté, a-t-il été dans la coulisse son inspirateur ?
Toujours est-il que la tactique utilisée en 1765 contre le parlement de Pau innova. Ce fut l’acceptation des démissions envoyées par les mutins, la réduction du nombre des offices, la reconstitution de la compagnie par recrutement des non démis et de magistrats nouveaux. Et cela réussit49. Mais le parlement de Navarre était le moindre du royaume et lorsque le Roi entendit appliquer le même traitement à celui de Rennes, plus nombreux, dont le ressort était plus vaste et coïncidait avec une province indocile, le résultat fut moins heureux et cette tentative contribua pour une part à réchauffement de la crise explosive à laquelle Louis XV et le chancelier de Maupeou mirent fin en 1771.
Une magistrature qui jouit d’une grande indépendance
Les mesures prises avant 1771 pour mater les cours désobéissantes ou rebelles n’ont donc jamais constitué, avec quelques variantes, que le recours perpétuel à l’interdiction ou à la relégation, solutions qui jamais n’avaient pu déboucher sur un procès et une condamnation en forme. Ce n’étaient que des expédients provisoires (quelle qu’ait pu être la durée de quelques-uns), dénués par conséquent de valeur exemplaire. Rendue à ses activités normales, la compagnie interdite ou exilée se considérait par là comme innocentée et retournait sans remords à ses vieux démons.
Avec les corps de magistrats, le souverain était dans l’incapacité d’empêcher le retour périodique des mêmes tensions, souvent génératrices de crises pernicieuses. Dans cette monarchie qui ignorait en principe la séparation des pouvoirs, la magistrature jouissait en fait d’une indépendance incroyable, fortement teintée d’impunité. Loin de peser sur les juges, l’autorité royale avait, au contraire, à se prémunir et se défendre contre leurs pressions. Le Roi était à peu près sans prise aussi bien sur tel ou tel magistrat en particulier, que sur le corps de chacune des compagnies d’officiers auxquelles il déléguait le pouvoir de rendre la justice en son nom.
De l’impuissance du roi à sanctionner un juge incapable ou corrompu
Sur son impuissance à l’égard d’un juge incapable et corrompu, un cas très simple, livré par la correspondance du chancelier de Pontchartrain, en apprend plus que de longs traités. Le 17 octobre 1704, ce ministre écrivait en ces termes à l’évêque de Carcassonne :
J’entre dans le même esprit que vous dans la peine que vous causent toutes les mauvaises qualités que vous me marquez se rencontrer dans la personne du juge mage de Carcassonne50. Je vous avoue que, se le portrait que vous m’en faites, je voudrois de tout mon cœur pouvoir remédier à un aussi grand mal, mais les moïens ne sont pas bien aisés. Un officier receü et en place depuis longtems ne se corrige que par menace ou insinuation, il ne peut être privé de sa charge, ni même interdit de ses fonctions, qu’en lui faisant son procès et ie ne vois rien dans tout ce que vous me mandez qui soit suffisant pour emploïer ce dernier remède avec succez. Il faut donc avoir recours au premier.
C’est sur la foy de votre témoignage que j’écris à ce juge mage. Mais, afin de ne rien obmettre de tout ce qui peut rendre plus efficace la voie de menace et d’insinuation dont ie viens de vous parler, je ne me contente pas d’écrire à cet officier. Suivant vos intentions, j’écris aussi à Mr de Basville et à Mr le procureur général du parlement. J’espère que cela l’obligera à changer de conduite et à remplir mieux tous ses devoirs à l’avenir qu’il n’a fait par le passé 51.
Voilà comment un souverain jaloux de son autorité et un chancelier actif et énergique étaient informés des défaillances professionnelles du premier magistrat d’un tribunal important : par les doléances de l’évêque du lieu et non par la voie hiérarchique. On reste étonné que le procureur général du parlement de Toulouse n’en ait rien su — ou rien voulu savoir — et n’en ait pas avisé le chancelier qui, dans la lettre qu’il lui adressa, — lui reprocha implicitement son défaut de vigilance52. Au reste, en acceptant de recevoir ce juge indigne, ce parlement n’avait-il pas déjà fait preuve de laxisme ?
Mais comment entamer et mener un procès contre un magistrat prévenu d’ignorance ou de manquements graves ? Sous l’Ancien Régime, le recrutement des juges était très localisé et, dans les villes et les régions où ils comptaient en masse parents, alliés, relations, il était très malaisé de trouver des plaignants, des témoins et des juges assez indépendants de leur milieu social et professionnel pour permettre l’ouverture et l’instruction d’un procès en forfaiture ou en corruption. Et si les torts d’un officier paraissaient avérés, sa famille n’allait-elle pas le contraindre à démissionner pour échapper à une sentence déshonorante, à la confiscation de son office et en garder la finance et la disposition ? Ce serait une recherche à entreprendre que celle des instances entamées à l’encontre de magistrats accusés de faute grave dans l’exercice de leurs fonctions.
Restait la possibilité d’exiler, voire embastiller, par lettres de cachet un officier de judicature. Mais le Roi y recourait moins contre tel juge soupçonné d’impéritie ou de prévarication, que contre les meneurs et les acteurs les plus en vue de l’agitation robine. Au surplus, la lettre de cachet n’avait en soi que la portée d’un avertissement, d’une admonestation : quelles que fussent ses dispositions, elle n’avait en rien valeur de sentence judiciaire, elle n’impliquait nulle condamnation et, par suite, n’entachait pas l’honneur de son destinataire, alors que, en matière pénale, outre la peine infligée, une inculpation et, à plus forte raison, une condamnation impliquaient une « macule » sur l’honneur du condamné. Il n’était donc pas certain qu’un juge fût amené à résipiscence en réintégrant son tribunal après en avoir été plus ou moins longtemps éloigné par un ordre du Roi, à moins qu’on ou lui eût fait entendre que cet ordre un serait rapporté que s’il démissionnait.
Il était donc très difficile au Roi de châtier personnellement un magistrat ignare, malhonnête, rebelle ou factieux, mais il lui était un plus malaisé de parvenir à condamner collectivement les compagnies de justice.
Une monarchie prisonnière de la vénalité des offices
La monarchie était en fait prisonnière de la vénalité et donc de l’hérédité des offices. Les mises en garde exprimées par le chancelier de Bellièvre lorsque, en décidant, contre son avis, d’adopter la « paulette », Henri IV et Sully affermirent définitivement vénalité et hérédité53, paraissent véritablement prophétiques :
L’affaire fust fort considérée et disputée. Enfin elle a passé par l’opinion de Mr de Rosny. Dieu veuille que bien en aviene ! Sitost que l’on parle d’argent, il fault doresnavant que toutes les raisons cessent. Dieu veuille regarder ce royaulme en pityé ! Je remonstray au contraire les inconvénients qui en aviendront nécessairement si un tel édit aura lieu. Premièrement, le Roy n’aura plus le choix d’aulcun officier. Verbi gratia, un président des enquêtes choysira la plus grosse beste du parlement, le iuge le plus corrompu. Il luy résignera son estat en cas qu’il meure.
Par cet édict, ie suys contrainct de recevoir pour président aux enquestes, qui sont les directeurs des ieunes conseillers, une beste, un homme corrompu et qui mettra toute la chambre en désordre. Ayant esté receü, ie ne le puis plus interroger si ie le tiens pour meschant homme, ie ne le puis plus reiecter sans luy fère son procès. Considérés aussi quels personnages pourront entrer à estre présidents en la grand’chambre, le semblable des aultres charges.
Les officiers ne seront plus officiers du Roy, ilz seront officiers de leurs bourses. Il y a en cela une aultre chose à considérer. Que un officier aye servy vingt et trente ans, que il aye faict au Roy et au public toutz les services que peult faire un homme de bien, il n’est plus au pouvoir du Roy de le gratifier d’un sol pour regard de son office. Les hommes servent en espérance d’estre récompensés. Oustés l’espoir de la récompense, vous privés le Roy du service.
Le poinct le plus considérable en cecy est que vous faictes perdre… toute l’espérance que peulvent avoir les provinces de veoir iamais la suppression du nombre effrené d’offices de judicature et aultres dont ilz souffrent une si grande ruyne. Les estatz du royaulme ont tousiours demandé la suppression. C’est chose qui leur a été promise, que l’on a tousiours iugé utile et nécessaire. Vous faictes un édict par lequel ce royaulme est privé de toute espérance de veoir iamais la suppression et l’ordre que l’on a désiré54.
Henri IV avait fait cette concession aux officiers, car il ne pouvait se passer de leur soumission et de leur bonne volonté pour mener à bien la restauration du royaume et de l’État. Serait-il revenu sur elle s’il avait régné plus longtemps et subi les effets nocifs qu’elle emportait à long terme ? Il est certain, en tout cas, que ni lui, ni son chancelier ne pouvaient imaginer à quel point, sous les deux règnes suivants, les rois allaient user et abuser des ventes d’offices, qui furent alors le meilleur moyen de tirer de leurs sujets des sommes impossibles à obtenir d’eux par l’impôt. La logique de la situation ainsi créée voulait que le Roi en vînt, pour exécuter sa politique, à recourir de plus en plus à des agents dont la fidélité et la diligence lui fussent sûres : le développement accru du rôle des commissaires a certainement eu là une de ses causes majeures.
De l’inflation des offices devenus quasi-héréditaires
Les conséquences funestes pressenties par Bellièvre alors que, déjà, les offices lui semblaient en « nombre effréné », se déployèrent peu à peu quand ceux-ci eurent été massivement multipliés.
Une très remarquable étude sur la vénalité des offices en France-Comté, où elle ne fut introduite qu’en 1692, vient de tirer, à partir d’un exemple limité dans l’espace et dans le temps, des conclusions applicables à tout le phénomène en France55.
Garantie depuis Louis XI à titre personnel à chaque magistrat, l’inamovibilité est devenue familiale : les fils et les gendres ont suivi nombreux la carrière de leur père ou beau-père, c’est-à-dire que le recrutement de la magistrature a échappé à peu près totalement au Roi, qui ne pouvait guère empêcher des hommes peu qualifiés d’accéder à la judicature. Du moment qu’un candidat à de telles charges avait prouvé qu’il en était héritier ou bien en avait versé la finance, on était peu regardant sur le reste et, dans la grande majorité des cas, il était pourvu de l’office, d’autant que les lettres de dispense d’âge, de dispense de parentés et alliances, voire de dispense de temps d’étude étaient rarement refusées.
Le contrôle de capacité personnelle que les parlements exerçaient ensuite en procédant à la réception d’un nouvel officier n’était d’ordinaire qu’une épreuve illusoire et, pour leur recrutement, ces cours, volontiers plus pointilleuses sur la naissance que sur la compétence, recouraient en fait à la cooptation.
Conséquence : la dévalorisation progressive des offices
L’inflation des offices de judicature finit à la longue par en déprécier la valeur, et pas seulement la valeur marchande. Elle ne pouvait qu’abaisser le niveau intellectuel, professionnel et moral de la robe. Certes, y eut-il toujours dans chaque compagnie des magistrats instruits et zèlés, qui peinaient stoïquement à expédier les procès pendant que leurs collègues travaillaient peu ou mal et pratiquaient l’absentéisme. Mais dès les dernières décennies du règne de Louis XIV, le système judiciaire du royaume donnait des signes de délabrement, camouflés par le decorum des robes rouges et des tapisseries fleur-delysées, par les discours pompeux et les tirades d’auto célébration auxquelles les parlements se sont complus de tout temps.
Le mal a frappé les cours supérieures comme les juridictions subalternes. Une de ses manifestations a été la chute du prix des offices : sensible depuis le dernier tiers du XVIIe siècle, elle s’est ensuite poursuivie de façon inexorable, lésant dans ses intérêts matériels l’ensemble de la magistrature, avec des répercussions différentes selon la hiérarchie des sièges de justice.
Dans les présidiaux, bailliages, sénéchaussées, prévôtés, vicomtes, châtellenies, vigueries et autres tribunaux inférieurs, non seulement les offices se vendaient mal, mais, faute d’acheteurs, certains restaient vacants. Les effectifs devinrent çà et là insuffisants pour un fonctionnement régulier, en particulier en matière pénale : faute de compter le nombre de juges légal pour statuer au criminel, les bailliages de Chauny56 de Mehun-sur-Yèvre et de Vierzon57, les présidiaux de Saint-Pierre-le-Moûtier58 et de Mantes59, le bailliage de Magny-en-Vexin60 virent leur compétence transférée ailleurs et cette énumération n’est pas exhaustive.
Une première tentative de réforme initiée par le Chancelier d’Aguesseau en 1728
Pour y voir clair, on ébaucha dès 1717 un recensement des officiers, tentative reprise en 1723 et 1724, puis par le chancelier d’Aguesseau en 1728 et encore en 1741. Ce ministre en déduisit qu’il était nécessaire de diminuer le nombre des sièges de justice et, par conséquent, celui des offices.
La première mesure prise en ce sens fut la réunion de la juridiction de la prévôté de Laon à celle du bailliage de cette ville, prononcée par un édit d’octobre 173061, qui servit de modèle pour tous ceux qui, au fil des ans, égrenèrent ensuite des décisions identiques.
Pour être aidé dans cette besogne, d’Aguesseau forma à la chancellerie un groupe de travail, le Bureau des Réunions, comprenant quatre conseillers d’État, deux maîtres des requêtes et le trésorier général des revenus casuels. Ce bureau a élaboré toutes les lois particulières et générales portant fusion de tribunaux et suppressions d’offices et il conçut le plan d’une réforme d’ensemble tendant, d’une part, à diminuer le nombre des présidiaux et, d’autre part, à réduire et fixer avec précision celui des juridictions royales inférieures et de leurs effectifs, que l’on répartirait en trois classes : des bailliages présidiaux avec vingt officiers, des bailliages non présidiaux avec onze officiers et enfin des bailliages de petite ville avec quatre officiers62.
Cette réforme fut mise en œuvre en 1751, non dans le ressort des parlements, mais là où c’était plus facile : dans les duchés de Lorraine et de Bar, en cours d’assimilation au royaume sous le sceptre du roi Stanislas et où la vénalité n’avait jamais été étendue aux offices de s supérieures63.
On voulut après opérer une refonte identique dans les sénéchaussées de Provence, mais les difficultés que fit naître le parlement d’Aix sur ce projet déterminèrent à en suspendre l’exécution.
Ajournement combien révélateur de l’obstruction ou des obstacles que les parlements opposaient à toute réforme de structure, petite ou grande. Déjà peu malléables par eux-mêmes, la multiplication inconsidérée des offices les a rendus plus difficultueux encore : plus une assemblée est nombreuse et plus elle est à la merci des meneurs. En outre, cet afflux de membres nouveaux s’opéra souvent au détriment de la qualification professionnelle de ces compagnies, enclines, par suite, à mobiliser l’esprit de corps pour masquer l’insuffisance d’une partie de leur personnel.
Bilan sur l’état des cours de justice en 1770
S’il y eut encore au XVIIIe siècle des officiers compétents dans les parlements et les tribunaux, les meilleurs juristes se rencontraient désormais dans le Conseil du Roi et parmi les avocats. Ces derniers, constatait en 1730 le cardinal de Fleury, sont « gens très capables, très instruits », « d’ordinaire plus instruits que le commun des magistrats »64.
D’autre part, l’esprit de corps, naturel en soi, fut renforcé non seulement par l’hérédité des charges, mais par le fait que, peu avant que la paulette ne vînt garantir et fortifier cette hérédité, l’anoblissement par exercice des offices de cour supérieure passa du stade coutumier par stade légal65, procurant par là un nouvel élément de cohésion. En outre, sans provoquer autant de vacances de postes que dans les justices subalternes, la chute du prix des offices n’en éprouva pas moins les parlements, où des suppressions durent être prononcées, et, en écornant le patrimoine des magistrats, leur fournit un motif supplémentaire de solidarité corporative.
Celle-ci, enfin, atteignit son paroxysme vers le milieu du siècle quand les différents parlements se prétendirent « les classes » d’un unique parlement de France et formèrent ainsi une véritable ligue.
La vénalité des offices et son corollaire l’hérédité aboutirent sous Louis XV au délabrement des institutions judiciaires du royaume. Résultat qui créa dans la haute robe un malaise d’autant plus pernicieux qu’elle se refusait à l’avouer et que, crispée dans un esprit de corps exacerbé, elle s’évertua à jeter sur lui le manteau de Noé par un redoublement d’agressivité et d’insoumission envers le pouvoir royal. Déstabilisant l’État pour instaurer le gouvernement des juges, elle rejetait comme manifestation de « despotisme » ou comme innovation contraire aux lois fondamentales du royaume toute réforme, toute initiative, toute possibilité de progrès. N’importe quoi devenait sujet à contestation ou à rébellion. La magistrature des cours supérieures était comme un kyste gigantesque paralysant le fonctionnement du corps politique du royaume.
Face à ces juges dont le recrutement lui échappait, face à ces officiers figés en bloc dans le conservatisme à la fois le plus batailleur et le plus ambitieux, Louis XV en était réduit à la fin de 1770 ou à capituler, ou à déclencher une riposte mieux appropriée que celles auxquelles lui-même et ses aïeux avaient eu recours jusque-là.
Durant les trente-cinq années passées au parlement de Paris avant son accession à la chancellerie, Maupeou avait observé et analysé à loisir le comportement de ses collègues, à la fois individuellement et en corps, un corps auquel lui-même et sa famille appartenaient depuis des générations. Il put ainsi indiquer au Roi le moyen sûr de sortir d’une situation apparemment sans issue.
La réforme Meaupou, ou l’abolition de la vénalité des charges
L’originalité foncière du coup de majesté opéré par Louis XV et Maupeou ne réside pas tant dans toute la série de mesures opportunes mises en œuvre dans le domaine strictement judiciaire, telles que :
– le fractionnement des ressorts parlementaires démesurés,
– la création de sept nouvelles juridictions d’appel,
– la diminution du nombre des charges dans les parlements,
– la suppression des tribunaux d’exception et la clarification de la procédure en découlant,
– l’établissement de la gratuité de la justice.
Cette originalité tient avant tout à l’abolition de la vénalité des offices de judicature, cette pratique dont le renforcement et la persistance avaient abouti à la constitution de corps soudés par l’esprit de caste dans ce qui n’était plus de l’indépendance, mais une ligue redoutable appliquée à déstabiliser l’État au bénéfice des privilégiés.
Abolir la vénalité,
– c’était faire tomber les murailles derrière lesquelles les cours supérieures se retranchaient pour retourner contre le souverain une autorité qu’elles se tenaient que de lui.
– C’était libérer l’État de la menace d’un gouvernement des juges,
– c’était rendre au Roi le contrôle du recrutement des tribunaux,
– c’était aussi rendre à chaque magistrat une liberté personnelle étouffée par l’esprit de corps.
Maupeou connaissait-il en détail les objections et les avertissements prodigués en 1602 par le chancelier son prédécesseur ? N’en avait-il qu’une notion confuse ou même aucune idée ? Toujours est-il que, sans peut-être en avoir conscience, il a enfin procuré en 1771 sa revanche à Bellièvre.
Michel Antoine.
Pour approfondir
Déjà paru sur viveleroy.net :
– Le discours de la flagellation, par Louis XV (3 mars 1766)
– Genèse du discours de la flagellation, par Michel Antoine
– Commentaire du discours de la flagellation
– Les conflits entre les parlements et le roi de France, par Michel Antoine
- Lettres patentes datées de Rouen le 10 septembre 1540 (Catalogue des actes de François Ier, t. 4. [Paris, 1890, in-4°], n° 11635). Lettres patentes datées de Fontainebleau le 16 décembre 1540 (ibid., n° 11761). A. Floquet, Histoire du parlement de Normandie, t. 2 (Rouen, 1840, in-8°), p, 11-16, 39-53.↩
- Pouvoir au connétable, daté de La Côte-Saint-André le 14 septembre 1548 (Catalogue des actes de Henri II, t. 2 [Paris, 1986, in-4°], n° 3578).↩
- S. C. Gigon, La révolte de la gabelle en Guyenne. 1548-1549(Paris, 1906, in-8°). C. B. F. Boscheron des Portes, Histoire du parlement de Bordeaux depuis sa création jusqu’à sa suppression (1451-1790), t. 1 (Bordeaux, 1877, in-8°), p. 81-96.↩
- Boscheron des Portes, ouvr. cité, p. 93.↩
- Lettres patentes datées de Fontainebleau le 4 mars 1564 commettant différents magistrats pour tenir le parlement d’Aix suspendu, enregistrées par eux le 14 avril suivant (Arch. dép. Bouches-du-Rhône, B 3653, fol. 3-4).↩
- Lettres patentes datées d’Arles le 5 décembre 1564 (ibid., B 3329, fol. 1). P. Champion, Catherine de Médias présente son royaume à Charles IX (1564-1565) [Paris, 1936, in-8°], J. Boutier, A. Dewerpe et D. Nordmann, Un tour de France royal (Paris, 1984, in-8°).↩
- Déclaration datée de Saint-Germain-en-Laye le 15 décembre 1639, portant interdiction des officiers du bureau des finances de Rouen (Arch. nat., AD+ 260 ; impr.).↩
- Déclaration datée de Saint-Germain-en-Laye le 17 décembre 1639 portant interdiction du parlement de Normandie (ibid. ; impr.).↩
- Déclaration datée de Saint-Germain-en-Laye le 17 décembre 1639 portant interdiction de la cour des aides de Normandie (ibid. ; impr.). Une déclaration du 15 décembre avait commis la cour des aides de Paris pour exercer la juridiction de celle de Rouen (ibid, ; impr.).↩
- Déclaration datée de Saint-Germain-en-Laye le 17 décembre 1639 portant interdiction des maire, échevins et autres officiers de la maison de ville (ibid. ; impr.).↩
- Déclaration datée de Saint-Germain-en-Laye le 17 décembre 1639, portant interdiction du lieutenant général du bailliage de Rouen (ibid. ; impr.).↩
- Pour le détail, voir : Floquet, ouvr. cité, t. 4 (Rouen, 1841, in-8°), p. 622-687, et t. 5 (Rouen, 1842, in-8°), p. 1-122. Et M, Foisil, La révolte des Nu-pieds et les révoltes normandes de 1639 (Paris, 1970, in-8°), p. 295-301 et 320-337.↩
- Édit daté de Saint-Germain-en-Laye en janvier 1641, portant rétablissement de la cour des aides de Rouen (Arch. nat., AD+ 264 ; impr.).↩
- Lettres patentes en forme d’édit datés de Saint-Germain-en-Laye en janvier 1641, portant rétablissement du patentes du parlement de Rouen (ibid. ; impr.).↩
- Lettres patentes datées de Saint-Germain-en-Laye le 31 mars 1641, portant rétablissement du corps de ville de Rouen (Bibl. nat., F. 23611 (478) ; impr.).↩
- Lettres patentes datées de Paris en octobre 1643, portant révocation des semestres du parlement de Rouen (ibid., F. 23611(568) ; impr.). Floquet, ouvr. cité, t. 5, p. 129-130.↩
- Lettres patentes en forme d’édit datées de Fontainebleau le 18 septembre 1645, portant rétablissement des semestres au parlement de Rouen (Arch, nat. AD+ 287 ; impr.). Floquet, ouvr. cité, t. 5, p. 133-143.↩
- Boscheron des Portes, ouvr. cité, t. 2, p. 42-189.↩
- Déclaration datée de Lyon le 28 décembre 1658, portant interdiction du parlement de Dijon (Arch. nat., AD+ 342 ; impr.) ; déclaration datée de Paris le 7 juin 1659, portant rétablissement de cette cour (ibid., AD+ 343 ; impr.), E. F, de Lacuisine, Le parlement de Bourgogne depuis son origine jusqu’à sa chute, t. 2, (Dijon, 1857, in-8°), p. 297-317.↩
- Voir R. Pillorget, Les mouvements insurrectionnels de Provence entre 1596 et 1715 (Paris, 1975, in-8°), p. Pillorget..↩
- Lacuisine, ouvr. cité, p. 112-113.↩
- E. Michel, Histoire du parlement de Metz (Paris, 1845, in-8°), p. 66-71. Déclaration datée de Dijon le 15 novembre 1658, portant rétablissement du parlement dans la ville de Metz (Arch. nat. ADXVI 14B ; impr.).↩
- Déclaration datée de Versailles le 18 septembre 1675 (Arch. nat., AD+ 446 ; impr.). F. Saulnier, Le parlement de Bretagne. 1554-1790, t. I (Rennes, 1909, in-4°) p. XXII. S. Ropartz, Exil du parlement à Vannes (Saint-Brieuc, 1875, in-8°). A. de La Borderie, La révolte du papier timbré advenue en Bretagne en 1675 (Saint-Brieuc, 1884, in-12).↩
- Déclaration datée de Versailles le 15 novembre 1675 (Arch. nat., AD+ 447 ; impr.). Boscheron des Portes, ouvr. cité, p. 198-218.↩
- E. Michel, ouvr. cité, p. 136-139. Édit daté de Versailles en octobre 1689 portant création d’un office de président à mortier et de six offices de conseillers au parlement de Bretagne et rétablissement de cette cour à Rennes (Arch. nat., AD+ 521 ; impr.). Boscheron des Portes, ouvr. cité, p. 217.↩
- Déclaration datée de Pontoise le 31 juillet 1652, portant translation du parlement de Paris à Pontoise (Arch. nat., AD+ 314 ; impr.). Déclaration datée de Paris le 21 octobre 1652, portant rétablissement du parlement en la ville de Paris (ibid. ; impr.). — On a ici laissé de côté le cas très particulier des cours et tribunaux implantés dans des villes passées à la Ligue et dont Henri III transféra le siège dans des villes fidèles.↩
- Déclaration datée de Paris le 21 juillet 1720, portant translation du parlement de Paris à Pontoise (Arch. nat., AD+ 760 ; impr.).↩
- Déclaration datée de Paris le 16 décembre 1720, portant rétablissement du parlement dans la ville de Paris (ibid., AD+ 762 ; impr.).↩
- Chronique de la régence et du règne de Louis XV (1718-1763) ou journal de Barbier, avocat au parlement de Paris (éd. Charpentier) [Paris, 1858, in-12], t. I, p. 81.↩
- Bibl. nat., Coll. Bréquigny, ms. 39, fol. 91-98, document portant in fine cette mention : « Copié le 28 juin 1721 sur l’original trouvé parmi les papiers de M. Law ».↩
- Cette proposition a fait l’objet, souvent dans les mêmes termes, de deux « Mémoire pour la réunion de la chambre des comptes, cour des aydes, domaines et finances de Dole au parlement de Besançon… » (Bibl. nat., Coll. Moreau, ms. 903, fol. 288-293 et 294-300). Ces mémoires ne sont pas datés, mais leur teneur révèle qu’ils remontent au ministère du duc de Bourbon et, plus précisément, sont postérieurs de peu aux édits de juillet 1724 portant suppression des offices municipaux et d’offices de secrétaires du Roi, dont s’autorise leur projet.↩
- Mémoires du maréchal de Villars, publ. pour la Société de l’Histoire de France par le marquis de Vogué, t. 5 (Paris, 1892, in-8°), p. 342-343.↩
- Barbier, ouvr. cité, t. 2, p. 306-307.↩
- Villars, ouvr. cité, t. 2, p. 306-307.↩
- M. Cuillieron, Contribution à l’étude de la rébellion des cours souveraines sous le règne de Louis XV : le cas de la cour des aides de Montauban (Paris, 1983, in-8°).↩
- Cinq présidents (dont le premier), deux chevaliers d’honneur, vingt-et-un conseillers, un procureur général, deux avocats généraux, deux greffiers en chef et cinq greffiers de moindre rang.↩
- Contrôleur général, des finances.↩
- Journal et mémoires du marquis d’Argenson, publ. pour la Société de l’Histoire de France par E. J. B. Rathery, t. 9 (Paris, 1867, in-8°), p. 210.↩
- Ibid., p. 357.↩↩
- Barbier, ouvr. cité, t. 6, p. 403-404.↩
- Le chancelier de Lamoignon au contrôleur général des finances ; 19 décembre 1757 (Arch. nat., 154 APII 27 ; minute autogr.). À cette lettre du chancelier était joint un mémoire détaillé sur cette opération (ibid.).↩
- M. Bourgeois de Boynes, intendant de France-Comté, au chancelier ; 11 janvier 1758 (ibid., orig.) ; y était jointe la copie de la lettre que, le même jour, il adressait au contrôleur général (ibid.).↩
- Le marquis de Monnier, premier président de la cour des comptes, aides et finances de Dole, au chancelier ; Dole, 12 février 1762 (Arch. nat., 154 APII 29 ; orig, autogr.).↩
- M. Vassal, huissier des Conseils, au chancelier ; Bordeaux, 10 juillet 1756 (Arch, nat. 154 APII 31 ; orig.). Charles Louis Vassal, huissier des Conseils du Roi de 1740 à 1763, était, selon Barbier (ouvr. cité, t. 7, p. 145), un « homme vif et ardent. »↩
- Voir ci-dessus, p. 41.↩↩
- Mémoire du chancelier de Lamoignon au Conseil sur l’affaire de l’intendant de Cæn avec les cours supérieures de Rouen ; août 1760 (Arch. nat., 154 APII 52 ; minute autogr.). Ce mémoire a pu être inspiré, au moins en partie, par une lettre que M. Feydeau de Brou, intendant de Rouen, lui avait écrite le 30 juillet 1760, où il recommandait vivement la destruction de la cour des comptes, aides et finances (ibid., 154 APII 53 ; orig.).↩
- « Matériaux pour un mémoire » (Bibl. nat., Coll. Moreau, ms, 1091, fol. 44-92) ; ce document ne porte pas de date, mais sa teneur le situe vers 1763.↩
- J. Egret, Le parlement de Dauphiné et les affaires publiques dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, t. I (Grenoble-Paris, 1942, in-8°), p. 93-119. H. de Bastard d’Estang, Les parlements de France, t. 2 (Paris, 1857, in-8°), p. 212-400. J.-B. Dubédat, Histoire du parlement de Toulouse, t. 2 (Toulouse, 1885, in-8°), p. 457-513.↩
- M. Bordes, D’Etigny et l’administration de l’intendance d’Auch (1751-1767), t. 2 (Auch, 1957, in-8°), p. 917-943. P. Delmas, Du parlement de Navarre et de ses origines (Bordeaux, 1898, in-8°).↩
- Ce magistrat se nommait Antoine d’Hélie de Saint-André. On sait que, dans certaines provinces du Midi, le titre de juge mage désignait les lieutenants généraux des sénéchaussées.↩
- Le chancelier de Pontchartrain à M. de Grignan, évêque de Carcassonne ; 17 octobre 1704 (Bibli. nat., Ms. fr., 21123, fol. 506 v°-507 ; copie). La lettre du chancelier au juge mage fut écrite le même jour (ibid., fol, 505 v°-506 ; copie).↩
- Le chancelier de Pontchartrain à M. Le Mazuyer, procureur général du parlement de Toulouse ; 17 octobre 1704 (ibid., fol. 504 ; copie). La lettre du chancelier à M. de Basville, intendant de Languedoc, de même date, y fait suite (ibid., fol. 504 v°-505 ; copie).↩
- Sur ce sujet, on se reportera à : R. Mousnier, « Sully et le Conseil d’État et des Finances. La lutte entre Bellièvre et Sully », dans Revue historique, t. 192 (1942), p, 68-86 ; et, du même auteur : La vénalité des offices sous Henri IV et Louis XIII (2e édit., Paris, 1971, in-8°), p, 232-248.↩
- Le chancelier de Bellièvre à M. de Villeroy, secrétaire d’État ; Fontainebleau, 29 novembre 1602 (Bibl. nat., Ms. fr. 15894, fol 543-546 ; orig. autogr.). Cette lettre est comme un écho encore vibrant des débats du Conseil ; ses arguments furent repris et développés, sur un ton plus posé, dans un mémoire que Bellièvre rédigea alors à l’intention de Henri IV (ibid., fol. 450-451 et 453-454 ; autogr.).↩
- M. Gresset, L’introduction de la vénalité des offices en Franche-Comté. 1692-1704 (Paris. 1989, in-8°).↩
- Arrêt du Conseil daté de Versailles le 25 juillet 1722 (Arch. nat., E 2033, fol. 65-66).↩
- Arrêt du Conseil daté de Versailles le 6 novembre 1723 (ibid. E 2044, fol. 363).↩
- Arrêt du Conseil daté de Versailles le 19 décembre 1732 (ibid., E 2126, fol. 537-538), prorogé par arrêts des 27 décembre 1733, 19 décembre 1734, 28 décembre 1735, etc. (ibid., E 2132, fol. 593-594 ; E 2139, fol. 587-588 ; E 2147, fol. 591-592 ; etc.).↩
- Arrêts du Conseil datés de Versailles le 7 juin 1734 (ibid., E 2139, fol 244-245) et le 19 mars 1735 (ibid., E 2147, fol. 126-127).↩
- Arrêt du Conseil daté de Compiègne le 2 août 1736 (ibid., E 2155, fol. 254-255).↩
- Édit daté de Versailles en octobre 1730 (Arch. nat., U 1163 ; impr.).↩
- Trois mémoires dressées en 1761 ont relaté les activités et exposé les projets du Bureau de Législation (Bibl. nat., coll. Moreau, ms. 1094, fol. 1-13 ; 15-24 ; et 25-28).↩
- Édit du roi Stanislas daté de Lunéville en juin 1751, portant suppression de tous les bailliages et prévôtés et création de nouveaux tribunaux (Arch. nat., ADvxvi 6B ; impr.).↩
- Le cardinal de Fleury au pape Clément XII ; 23 octobre 1730 (Arch. Aff. étr., Corr. pol. Rome, 715, fol. 400-409 ; minute).↩
- F. Bluche et P. Durye, L’anoblissement par charges avant 1789, t. 2, (Paris, 1962, in-4°).↩