Droit divin
On appelle droit divin ce qui est promulgué par Dieu, qu’il s’agisse de choses naturellement justes, mais dont la justice est cachée aux hommes, ou de choses qui deviennent justes par institution divine.
Saint Thomas d’Aquin, Somme théologique, question 57 (Le droit), article 2, solution 3.
Les défenses des crimes sont de droit divin et naturel.
Jean Bodin, Les Six Livres de la République, livre I, chap. IX (De la souveraineté), Librairie Jacques du Puys, Paris, 1577, p. 147.
Tous les gouvernements sont dans un sens de droit divin, omnis potestas a Deo. Soit que la providence les accorde aux peuples comme un bienfait, ou les leur impose comme un châtiment, ils sont encore, ils sont surtout de droit divin lorsqu’ils sont conformes aux lois naturelles de l’ordre social dont le suprême législateur est l’auteur et le conservateur, et le pouvoir public ainsi considéré n’est pas plus ni autrement de droit divin que le pouvoir domestique. […]
Le droit divin tel qu’ils [ses détracteurs] feignent de l’entendre serait la désignation spéciale, faite par Dieu lui-même, d’une famille pour régner sur un peuple, désignation dont on ne trouve d’exemple que pour la famille des rois hébreux d’où devait naître le sauveur du monde ; au lieu que nous ne voyons le droit divin que dans la conformité des lois sociales aux lois naturelles dont Dieu est l’auteur : dans la religion chrétienne, dit Bossuet, il n’y a aucun lieu, aucune race qu’on soit obligé de conserver à peine de laisser périr la religion et l’alliance.
Louis de Bonald, Louis de Bonald. Réflexions sur la Révolution de Juillet 1830 et autres inédits, DUC/Albatros, 1988, p. 44 et p. 82.
Pour un Souverain quelconque, régner de « droit divin », c’est tout simplement régner légitimement, en vertu de droits légitimes ; c’est être le représentant légitime de Dieu pour le gouvernement d’une société, d’un peuple. De là cette formule célèbre, qui fait tant crier les impies et les ignorants : régner par la grâce de Dieu.
Mgr de Ségur, Vive le roi !, Haton éditeur, Paris, non daté, p. 13-14.
Je crois […] pouvoir résumer en deux mots toute la théorie de Bossuet sur le droit divin des rois. Le pouvoir vient de Dieu, en ce sens que la majesté royale est un écoulement de la majesté divine ; ce qui d’abord est la doctrine de saint Paul, ce qui de plus ne me semble pas pouvoir être nié par quiconque admet l’existence de Dieu comme source et principe suprême de tout droit. […] D’où il suit que le droit divin des rois, comme l’entend Bossuet, devient je ne dirai pas même une vérité chrétienne, mais un principe de sens commun.
Mgr Freppel, Bossuet et l’éloquence sacrée au XVIIe siècle, tome II, Victor Retaux et fils, Libraires-éditeurs, Paris, 1893, p. 89.
Quelle pouvait être notre règle de conduite, à nous autres libéraux, qui ne pouvons pas admettre le droit divin en politique, quand nous n’admettons pas le surnaturel en religion ? Un simple droit humain, un compromis entre le rationalisme absolu de Condorcet et du XVIIIe siècle, ne reconnaissant que le droit de la raison à gouverner l’humanité, et les droits résultant de l’histoire.
Ernest Renan, La réforme intellectuelle et morale, Michel Lévy Frères, Paris, 1871, p. 40.